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Analyse approfondie du Plan Économique et Social du Maroc : Réalisations, Perspectives et Contraintes

Le Plan Économique et Social du Maroc, lancé il y a plus de cinq ans, représente une feuille de route ambitieuse visant la transformation structurelle du pays. En tant que levier pour la modernisation des infrastructures, la réforme du système fiscal, la généralisation de la couverture sociale et le renforcement des institutions publiques, il ambitionne de propulser le Maroc vers un avenir plus inclusif, résilient et durable. Alors qu’en 2025 le pays se rapproche d’une étape charnière, il devient essentiel de dresser un bilan des progrès réalisés, des défis qui persistent, et des perspectives à court terme. Cet article propose une analyse détaillée des réussites, identifie les obstacles et avance des propositions pour optimiser les réformes en cours.

I. Réalisations : Progrès Tangibles, mais Défis Persistants
A. Transition énergétique : Un Leadership Régional Consolidé

Le Maroc a fait des progrès notables dans sa transition énergétique, s’imposant comme un leader régional dans la production d’énergies renouvelables. En 2024, la capacité installée a atteint 5,4 GW, représentant environ 45% du mix électrique national. Avec un objectif ambitieux de porter cette part à 60% d’ici 2030, le pays dépasse ainsi l’objectif initial de 52%. Cette dynamique a été soutenue par des investissements massifs, estimés à près de 7 milliards d’euros pour ajouter 7 GW supplémentaires d’ici 2030. Le complexe solaire Noor à Ouarzazate et les parcs éoliens de Tarfaya et Midelt ont propulsé le Maroc comme un modèle en Afrique et dans le monde arabe.

Cependant, malgré cette croissance soutenue, des défis demeurent, notamment la gestion de l’intermittence des énergies renouvelables. Le stockage de l’énergie reste une question cruciale pour garantir la stabilité du réseau. De plus, l’intégration des énergies renouvelables dans le mix énergétique doit s’accompagner de solutions de stockage à grande échelle. La coopération régionale, notamment avec les pays voisins, est essentielle pour développer des interconnexions électriques et améliorer la gestion de l’énergie.

B. Réforme fiscale : Des Avancées Notables, mais des Défis Structurels

La réforme fiscale, pilier du Plan Économique et Social, vise à améliorer les capacités budgétaires de l’État tout en luttant contre l’évasion fiscale et en élargissant la base d’imposition. En 2024, le taux de pression fiscale a progressé légèrement pour atteindre 21,8% du PIB, contre 20,6% en 2020. Cette avancée est le résultat de nouvelles mesures fiscales telles que la numérisation des services fiscaux et l’extension de la TVA à de nouveaux secteurs.

Cependant, des défis demeurent. Le poids de la masse salariale publique, représentant environ 11% du PIB, reste une contrainte majeure. La gestion des augmentations salariales et le renouvellement des effectifs de la fonction publique, particulièrement face aux départs massifs à la retraite entre 2024 et 2028, risque d’entraîner une pression supplémentaire sur le budget de l’État. En outre, malgré les efforts pour inclure davantage de travailleurs du secteur informel, ce secteur, représentant environ 30% du PIB, reste largement exclu du système fiscal. La simplification des procédures fiscales et la promotion de l’informatisation des entreprises demeurent donc des priorités pour rendre la réforme fiscale plus inclusive et équitable.

C. Couverture sociale : Des Progrès, mais des Inégalités Persistantes

L’un des objectifs les plus ambitieux du Plan Économique et Social est la généralisation de la couverture sociale, avec l’introduction de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO). En 2023, près de 11 millions de Marocains, soit 85% de la population active, bénéficient de l’AMO. Ce progrès majeur améliore l’accès aux soins de santé, notamment pour les travailleurs du secteur privé.

Cependant, des inégalités demeurent, particulièrement dans les zones rurales et au sein du secteur informel. Le pays souffre d’une pénurie de professionnels de santé, et l’accès aux soins reste limité dans les régions éloignées. Il est nécessaire d’augmenter les infrastructures de santé et de former des travailleurs dans ces zones. Une attention particulière doit également être portée à l’extension de la couverture sociale aux travailleurs informels, une part significative de la population active, souvent privée des prestations sociales de base.
 


 
II. Perspectives pour 2025 : Ambitions et Stratégies
A. Investissement Public : Un Record de 340 Milliards de Dirhams

Le gouvernement marocain prévoit un investissement record de 340 milliards de dirhams (environ 34 milliards d’euros) en 2025, visant à renforcer l’infrastructure et soutenir la croissance. Ce budget exceptionnel sera axé sur deux priorités : la modernisation des infrastructures de transport et la transition énergétique. Parmi les projets clés figurent l’extension du port de Tanger Med, le premier port africain en termes de trafic, et la construction de nouvelles lignes de train à grande vitesse. Ces projets devraient accroître la compétitivité du pays et renforcer son rôle de hub logistique régional.

L’investissement dans les énergies renouvelables sera également une priorité, avec des projets visant à augmenter la capacité de production d’énergie verte et à améliorer la gestion de la consommation. Ces investissements devraient stimuler la croissance économique tout en générant des emplois durables, notamment dans les secteurs de l’énergie, des transports et des infrastructures.

B. Réforme Fiscale : Simplification et Élargissement de la Base d’Imposition

Le Maroc poursuit la mise en œuvre de sa réforme fiscale avec des ajustements législatifs visant à simplifier le système fiscal, améliorer la transparence et renforcer l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers. L’élargissement de la base d’imposition, en particulier pour les secteurs informels, et la réduction de la bureaucratie fiscale demeurent des priorités. L’introduction de la e-fiscalité devrait faciliter les démarches pour les entreprises et les particuliers, tout en réduisant les risques de fraude et d’évasion fiscales.

C. Couverture Sociale : Extension aux Travailleurs Informels

En 2025, le gouvernement prévoit de franchir un pas décisif dans l’extension de la couverture sociale aux travailleurs informels. Cette réforme vise à mettre en place de nouvelles indemnités pour perte d’emploi et d’allocations familiales, renforçant ainsi la protection sociale des travailleurs précaires. Toutefois, cette deuxième phase de la réforme reste incertaine en raison des obstacles administratifs et financiers. Des efforts accrus seront nécessaires pour garantir que ces mesures profitent réellement aux travailleurs vulnérables et soutenir l’intégration des secteurs informels dans le système formel.
 

III. Contraintes : Défis Internes et Externes
A. Environnement Économique Mondial Incertain

L’environnement économique mondial de 2025 demeure incertain, marqué par des tensions géopolitiques, l’instabilité des prix des matières premières et l’impact croissant du changement climatique. Ces facteurs affectent directement la stabilité macroéconomique du Maroc, notamment en ce qui concerne la gestion de la dette publique et la fluctuation des prix de l’énergie. De plus, les pays exportateurs de pétrole et de gaz, en particulier du Moyen-Orient et d’Afrique, continuent de jouer un rôle central dans la fixation des prix de l’énergie, ce qui a des répercussions sur les finances publiques marocaines.

B. Résistances Internes et Lenteur Administrative

La mise en œuvre des réformes reste freinée par des résistances internes et une lenteur administrative. La coordination interinstitutionnelle insuffisante et la pénurie de ressources humaines qualifiées, notamment dans des secteurs-clés comme la santé et l’éducation, représentent des obstacles importants à l’efficacité des réformes. En 2025, surmonter ces difficultés sera crucial pour garantir la fluidité de l’exécution des projets à grande échelle.
 

IV. Conclusion : Une Trajectoire Ambitieuse, mais Semée d’Embûches
Le Plan Économique et Social du Maroc continue de poser les bases d’une transformation significative du pays. Les réalisations tangibles dans les secteurs des infrastructures et de la transition énergétique sont indéniables. Toutefois, les défis persistent, en particulier dans les réformes fiscales, la couverture sociale et la modernisation des institutions publiques. À l’aube de 2025, une année clé pour la mise en œuvre de projets majeurs, l’efficacité du plan dépendra de la capacité du gouvernement à répondre aux défis internes et externes, tout en maintenant une trajectoire stable vers un développement durable, inclusif et résilient.

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