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​Chirurgie robotique et ablation totale de la prostate : Quand la médecine se laisse piéger par la mode

Dans une salle d’opération climatisée à Casablanca, à Marrakech ou à Paris, un bras articulé lisse et silencieux s’anime, guidé par les mains d’un chirurgien assis à une console.

Les écrans s’illuminent, les caméras plongent au cœur du corps humain, et la prostate, organe discret mais capital, est retirée avec une précision chirurgicale. 

 C’est l’image que l’on vend aujourd’hui : celle d’une médecine futuriste, presque irréelle, débarrassée des erreurs humaines grâce au robot. 

 Mais cette image est trompeuse. Et dangereuse. 

La chirurgie robotique a indéniablement apporté un confort certain pour le praticien et, dans certains cas, des suites opératoires moins lourdes. 

Mais il faut le dire haut et fort : le robot n’est pas un miracle médical. 

Il ne guérit pas mieux. 
Il n’évite pas les complications majeures d’une prostatectomie ( ablation) radicale. 

Et surtout, il ne remplace ni la réflexion clinique, ni l’individualisation du soin.

Pourtant, un vent de folie souffle sur la planète santé. 

Le robot est devenu un objet de fascination, un totem technologique qui rassure, impressionne, attire. 

Au Maroc comme ailleurs, des patients de plus en plus jeunes, de plus en plus inquiets, exigent « le robot » avant même d’avoir compris les alternatives possibles à leur cancer de la prostate ou autre pathologie prostatique. 

On assiste à une sorte de consumérisme médical, où le patient ne choisit plus un traitement, mais un gadget.

Le problème, c’est que cette fascination se double d’un emballement commercial, savamment entretenu. 

Certains établissements privés l’affichent comme un argument de prestige, une preuve de modernité, un luxe thérapeutique. 

Les réseaux sociaux, les salons de la médecine, certaines publications vantent le robot comme on vanterait une voiture de sport : « plus rapide, plus précis, plus sûr ». 

Le tout pour un coût astronomique, souvent à la charge du patient. 

Et cela dans un pays où on sue pour un système national de couverture sanitaire, viable sur le long terme.

Dans cette logique perverse, la prostatectomie radicale — intervention lourde, aux conséquences parfois dramatiques sur la vie sexuelle et urinaire — devient un passage obligé, non parce qu’elle est la meilleure option, mais parce qu’elle est techniquement possible et « modernisée ». 

On oublie trop vite que de nombreux cancers de la prostate évoluent lentement, qu’une surveillance active ou une radiothérapie sont parfois bien plus pertinentes, surtout pour des patients âgés ou porteurs de comorbidités.

L’enjeu est donc éthique. Sommes-nous en train de soigner des patients ou de leur vendre une image du progrès téchnologique appliquée à la médecine   ? 

Allons-nous sacrifier l’écoute, l’explication, la nuance, sur l’autel de la technologie ? 

La chirurgie robotique, comme tout progrès, doit être utilisée à bon escient, dans l’intérêt du patient, non dans celui des fabricants ou des investisseurs de la santé.

Il est temps de ralentir. 

De réfléchir. 
De replacer l’indication médicale au centre. 

De rappeler que l’avenir de la médecine ne se joue pas dans le design d’un robot, mais dans la qualité de la décision partagée entre médecin et patient. 

Il est temps de dire que parfois, le plus moderne et le plus efficient, c’est de ne pas opérer.
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