Fitch Solutions a récemment révisé ses prévisions de croissance pour l’économie marocaine en 2025, les abaissant légèrement de 5,0 % à 4,8 %. Cette correction n’altère toutefois pas la dynamique globale jugée positive, ce taux demeurant le plus élevé depuis 2021. Il traduit une accélération notable par rapport à la croissance attendue en 2024, elle-même ramenée de 3,3 % à 3,2 %.Détails.
Selon le rapport, cette reprise devrait se poursuivre et s’intensifier en 2026, avec une croissance prévue de 5,5 %. Cette amélioration serait soutenue par un redressement progressif de la production agricole et une consolidation de la demande intérieure. Fitch anticipe également que les préparatifs pour la Coupe du Monde 2030 stimuleront l’investissement en infrastructures et la formation de capital.
Performances récentes contrastées
Les données publiées par le Haut-Commissariat au Plan (HCP) le 31 mars 2025 montrent que le produit intérieur brut réel a progressé de 3,7 % au quatrième trimestre de 2024, un niveau inférieur aux anticipations de Fitch Solutions. Ce décalage s’explique par un affaiblissement de la performance de plusieurs secteurs non agricoles.
Le secteur agricole a connu la plus forte contraction, avec un recul de 4,9 %, marquant ainsi un quatrième trimestre consécutif de baisse. Cette contre-performance résulte de la persistance de conditions de sécheresse. L’activité industrielle a également ralenti, son taux de croissance chutant de 7,5 % au troisième trimestre à 3,7 % au quatrième, principalement à cause d’un repli de la production dans l’industrie automobile.
En revanche, certains secteurs ont affiché une résilience notable. Le secteur du bâtiment et des travaux publics a enregistré une hausse de 7,0 %, traduisant une dynamique soutenue. L’administration publique a également renforcé son activité, passant de 3,7 % à 3,9 %, portée par des politiques budgétaires expansionnistes mises en œuvre par le gouvernement.
Moteurs de la croissance à venir
Fitch Solutions prévoit une accélération de la croissance dans les prochains trimestres, tirée par une demande intérieure robuste et une amélioration progressive de la balance commerciale. La consommation privée devrait croître de 4,1 % en 2025 contre 3,2 % en 2024, contribuant pour 2,2 points de pourcentage à la croissance du PIB. Cette hausse serait alimentée par une progression du revenu réel des ménages et une désinflation continue.
L’investissement fixe est attendu en nette augmentation, avec une croissance de 7,1 % prévue en 2025, ce qui ajouterait également 2,2 points à la croissance globale. Cette dynamique serait soutenue par une baisse anticipée des coûts d’emprunt. Fitch prévoit en effet que Bank Al-Maghrib abaissera son taux directeur à 2,00 % d’ici fin 2025, après une réduction de 25 points de base en mars 2025 et de 50 points de base au cours de l’année 2024.
De plus, le taux d’utilisation des capacités de production ayant atteint des niveaux quasi records, les entreprises seraient incitées à accroître leurs investissements. Les flux d’investissement direct étranger devraient aussi se maintenir à un niveau élevé, après une hausse de 55,4 % en 2024, avec un intérêt particulier pour les secteurs de l’automobile, de l’aéronautique et des énergies renouvelables.
Dans le cadre d’une politique budgétaire expansionniste, les dépenses publiques devraient croître de 2,6 % en 2025, contribuant à hauteur de 0,5 point à la croissance. Cette progression serait soutenue par une hausse importante des dépenses courantes (hors intérêts de la dette), grâce à la mobilisation de ressources internes et de financements extérieurs, notamment un prêt de 500 millions d’euros accordé par la Banque européenne d’investissement, ainsi qu’un soutien du Fonds monétaire international via les programmes de résilience et de durabilité.
Risques et déséquilibres à surveiller
Malgré ces perspectives favorables, plusieurs risques persistent. Le secteur agricole, bien qu’attendu en reprise, devrait rester sous pression en 2025 en raison des incertitudes climatiques. Cela pourrait prolonger les dynamiques migratoires des campagnes vers les centres urbains, accentuant la saturation du marché du travail urbain et aggravant le chômage.
Toutefois, une amélioration modérée de la production alimentaire pourrait réduire la dépendance du pays aux importations, ce qui allégerait la pression sur la balance commerciale. Dans ce sens, Fitch prévoit une légère amélioration de la contribution nette des exportations à la croissance, estimée à +0,1 point de pourcentage en 2025, contre une contribution négative de -1,2 point en 2024. Cette amélioration reposerait sur une reprise de la demande européenne et une hausse des exportations marocaines de biens et services.
Enfin, Fitch met en garde contre un éventuel ralentissement de l’économie européenne qui pourrait nuire à la performance des exportations marocaines, en particulier dans les secteurs clés que sont l’automobile et le textile. La poursuite d’un repli agricole constituerait également une menace sérieuse, en compromettant l’équilibre du marché du travail et en renforçant la dépendance extérieure.