​Interview avec Ramsay Rankoussi et Elie Younes « Quand l’hôtellerie se réinvente grâce à la dynamique du tourisme »

Radisson Hotel Group compte élargir sa présence au Maroc pour se doter de 30 unités hôtelières à l’horizon 2030, dans la perspective de la Coupe du Monde 2030. Interview croisée avec Elie Younes, Vice-Président Exécutif, Directeur Général Développement Global du groupe et Ramsay Rankoussi, Vice-Président, Développement, Afrique & Turquie que nous avons rencontré en marge du « Morocco Showcase Summit ».

Quel bilan faites-vous de votre présence au Maroc, notamment en matière d’emploi et comment Radisson Group compte s’expandre dans le Royaume, notamment dans la perspective de la Coupe du Monde de 2030 ?

Elie Younes : Actuellement, nous avons neuf hôtels opérationnels au Maroc, répartis de manière quasi égale entre les segments d’affaires et de loisirs. Par ailleurs, quatre autres établissements sont en cours de construction, portant ainsi le nombre total à environ 13 hôtels dans le pays, pour un total de 2000 à 2500 chambres. En général, on estime qu’il y a un emploi pour chaque deux chambres, ce qui signifie que près de 1500 familles bénéficient directement de ces créations d’emplois.  

Notre ambition pour les années à venir est de doubler ce portefeuille, avec pour objectif d’atteindre 30 hôtels, représentant potentiellement 4500 chambres d’ici 2030. Cela pourrait générer environ 2500 emplois supplémentaires pour les familles marocaines. Ces nouveaux établissements seront implantés dans les grandes villes telles que Marrakech, Tanger, Rabat, Fès et Agadir, mais nous envisageons aussi l’ouverture de nouveaux hôtels à Casablanca, notamment des établissements de type skyline. La métropole accueillera bientôt l’ouverture de notre hôtel « Lincoln », renforçant ainsi la présence du groupe Radisson au Maroc.

Nous projetons également la création d’un centre culturel dédié à l’hôtellerie. Le développement sera, par ailleurs, guidé par les besoins du marché, avec un accent particulier sur les régions du Sud, notamment Agadir et encore Al Hoceima, ainsi que Saïdia où le groupe opère déjà.   
 

Quelle place pour les compétences marocaines dans vos établissements ? 

Ramsay Rankoussi : Effectivement, cela fait partie des engagements sociaux et sociétaux de Radisson. Le groupe s’efforce de promouvoir la formation et la création d’emplois au niveau local, tant directement, au sein de nos établissements, qu’indirectement, en travaillant avec nos fournisseurs.
En plus des postes occupés par des compétences locales, les directions générales de nos hôtels sont également dirigées par des Marocains. Par ailleurs, Radisson pourrait, à l’avenir, offrir des opportunités pour les talents marocains afin qu’ils travaillent à l’international, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives de carrière pour la jeunesse du pays.
 

Qu’est-ce qui motive aujourd’hui Radisson dans son expansion au Maroc ?

 Elie Younes : Ce qui nous intéresse particulièrement au Maroc, c’est la combinaison d’atouts culturels, touristiques et économiques intéressants. Le pays bénéficie d’une forte attractivité, tant pour les touristes que pour les investisseurs internationaux, grâce à un climat politique et économique stable. Le gouvernement marocain semble de plus en plus engagé dans le développement de l’industrie, ce qui renforce l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers. Par ailleurs, les Marocains possèdent des compétences uniques et une forte capacité à contribuer à l’industrie hôtelière, avec une culture du travail chaleureuse et un sens de l’hospitalité qui les distingue des autres pays.
 

Revenons à vos futurs projets au Maroc. Quel intérêt portez-vous pour les petites villes ?

Ramsay Rankoussi : Ces villes offrent un potentiel intéressant, notamment en raison des coûts fonciers relativement bas et de la concurrence moindre. Cependant, il est essentiel de vérifier qu’il y ait une demande opérationnelle suffisante. Si cette condition est remplie, je suis convaincu que personne ne refusera de se lancer.
Nous portons une attention particulière à ces villes, qu’elles soient culturelles, industrielles ou économiques. Cependant, nous cherchons toujours à créer des économies d’échelle, en ne nous contentant pas de projets isolés, mais en identifiant des opportunités de plusieurs projets simultanés pour maximiser la rentabilité et optimiser les coûts.

La deuxième phase de notre stratégie pourrait inclure l’ouverture d’hôtels dans des petites villes, en fonction de l’évolution du marché et des opportunités économiques. Nous adoptons une approche réactive, qui nous permet de nous adapter aux changements de la conjoncture.
 

Quelle est l’importance de la Coupe du Monde 2030 dans le développement du secteur hôtelier ?

Elie Younes : La Coupe du Monde aidera à accélérer ces projets, mais le Maroc est déjà bien engagé dans son développement bien avant cet événement. La Coupe du Monde agira surtout comme un catalyseur pour mettre en valeur les projets en cours.

Nous espérons établir des partenariats stratégiques pour développer davantage d’hôtels. Le rôle du gouvernement est crucial pour assurer la réussite de cette dynamique, en mettant en place des politiques de marketing efficaces et des plans macroéconomiques adaptés. Il est également essentiel de continuer à investir dans l’infrastructure, à améliorer l’accessibilité aérienne et à établir des réglementations claires pour encourager les investissements. Cela créera un environnement de confiance, permettant aux porteurs de projets de se lancer et de réaliser leurs visions avec succès.

La nature du tourisme dans chaque ville constitue également un enjeu clé pour les futurs investisseurs. Il est donc essentiel pour le Maroc de diversifier l’offre touristique de ses villes, en trouvant un équilibre entre le tourisme d’affaires et le tourisme de loisirs.
 

L’augmentation de la capacité d’accueil des établissements du Maroc exige bien évidemment de ressources humaines qualifiées pour répondre aux besoins croissants. Comment évaluez-vous l’intérêt de la jeune génération à ce métier ?

Ramsay Rankoussi : Le Maroc a clairement l’ambition d’obtenir des résultats exceptionnels dans le secteur du tourisme, avec l’appui des secteurs public et privé. Cependant, un défi majeur pour soutenir cette croissance réside dans le manque de compétences nécessaires pour accueillir, gérer et satisfaire les touristes dans ces nouveaux hôtels. C’est pourquoi il est crucial de se concentrer sur la formation, en développant de nouvelles écoles hôtelières destinées à préparer les talents nécessaires pour répondre aux besoins croissants du secteur.

Il est également essentiel de rendre l’industrie hôtelière plus attractive pour les nouvelles générations, en faisant un choix de carrière privilégié. Cela passera par l’amélioration des conditions de travail, notamment en matière d’infrastructures et d’environnement de travail, afin de valoriser ce métier et d’attirer davantage de jeunes professionnels.
 

Quel conseil donneriez-vous aux investisseurs désirant réaliser des projets au Maroc ?

Elie Younes : Il est essentiel de placer les bons talents aux bons postes, en accordant une attention particulière à l’embauche de talents locaux. En recrutant des personnes issues de la communauté locale, on favorise l’intégration et la connaissance du marché, des attentes des clients, ainsi que des particularités culturelles. De plus, cela contribue à l’essor économique du pays en créant des emplois durables pour les habitants, tout en renforçant la cohésion sociale.

Ramsay Rankoussi : Le Maroc regorge d’opportunités pour tous. Il est important de rappeler que Radisson a été l’un des premiers groupes hôteliers à s’implanter dans le pays, bien avant que le Maroc ne devienne une destination prisée par de nombreux investisseurs. Le groupe a su anticiper l’évolution du Maroc en tant que destination touristique majeure, et c’est ce que les nouveaux entrants devront faire en préparation de l’année 2030.

Pour réussir, il est crucial de prendre le temps nécessaire afin de choisir les bons partenaires et réaliser les projets au bon endroit, tout en faisant preuve de patience face aux défis liés à l’économie d’échelle qui peuvent surgir à moyen terme.

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