Le Maroc et le Brésil, deux puissances maritimes aux ambitions communes, s’unissent pour façonner l’avenir de l’Atlantique. En misant sur la complémentarité de leurs atouts et en renforçant leur coopération économique et stratégique, les deux pays entendent jouer un rôle de premier plan dans la nouvelle géopolitique de cet océan.
Dans une tribune parue lundi dans le magazine brésilien « Diplomatie Business », qui se définit comme un « portail d’actualités internationales centré sur la diplomatie et les affaires », le diplomate marocain écrit que le Maroc et le Brésil, qui nourrissent « une ambition commune pour l’Atlantique », ont « réussi à construire, sous le double sceau de la confiance et de l’ambition, une relation solide et robuste, une relation multi-acteurs et multi-sectorielle et une relation qui a investi, avec grand succès, dans les niches de sécurité alimentaire et logistique aérienne et maritime ».
L’argumentaire de l’ambassadeur du Royaume commence par un postulat : le Maroc « fait partie du cercle très restreint des pays qui disposent d’un double accès maritime : l’Atlantique et la Méditerranée », ajoutant que le Royaume « s’est pleinement engagé dans l’optimisation stratégique de ce précieux atout géographique, dont les contours ont été dessinés par Sa Majesté le Roi Mohammed VI ».
Rappelant le passage du discours Royal de novembre 2023 dans lequel le Souverain exprime le souhait de faire de la façade atlantique « un haut lieu de communion humaine, un pôle d’intégration économique et un centre de rayonnement continental et international », l’ambassadeur souligne que les deux pays (Maroc et Brésil) partagent « le même avantage géographique » qu’ils s’emploient à mettre en valeur pour le bénéfice de leurs populations.
« De manière tout aussi convergente, le Maroc et le Brésil ont promu, quasi simultanément en 2020, dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, leurs droits souverains respectifs sur leur mer territoriale, leur zone économique exclusive et leur plateau continental », poursuit la chronique.
C’est à la lumière de cette vocation maritime commune que l’on peut comprendre la projection atlantique de chacun des deux pays. Du côté brésilien, il s’agit principalement de la ZOPACAS (Zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud), que le pays a lancée en 1986 et qui regroupe 24 pays des deux côtés de l’Atlantique.
Pour le Maroc, les trois projets les plus emblématiques dans ce contexte sont le port de Dakhla-Atlantique et le corridor logistique bénéficiant aux quatre pays africains du Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad) et le gazoduc Nigeria-Maroc, qui vise à relier les installations énergétiques de 14 pays africains riverains de l’Atlantique.
Le troisième projet emblématique est le Processus des États Africains Atlantiques (PEAA) que le Maroc a lancé en 2020 et qui vise à stimuler l’intégration régionale de 23 pays de la façade atlantique de l’Afrique, à travers trois « paniers » : 1) sécurité, 2) économie bleue, maritime connectivité et énergie, et 3) développement durable ».
Et Nabil Adghoghi d’expliquer que « toutes ces initiatives convergent et visent à générer des synergies dans la mesure où elles ambitionnent de faire de l’Atlantique Sud un espace politiquement sûr, économiquement intégré et durable ».
Cette « vocation maritime » du Maroc et du Brésil, a-t-il suggéré, est appelée à capitaliser sur le cadre juridique bilatéral existant, notamment les accords et conventions relatifs à la défense, à la sécurité, à la non-double imposition et à la coopération douanière.
Après avoir constaté que le Maroc et le Brésil « convergent pleinement sur le fait que, pour mieux appréhender les nouveaux concepts de nearshoring, d’économie bleue et de souveraineté maritime désormais incontournables en géoéconomie, la dimension maritime est, plus que jamais, un élément essentiel de la stratégie de développement économique du Maroc ».
Nabil Adghoghi se réjouit aussi de constater que le statut d’« acteur global » auquel les deux pays « aspirent légitimement a pour postulat de base la complémentarité de leur principal atout : la sécurité alimentaire (engrais pour le Maroc et productivité agricole élevée pour le Brésil) ».
Pour lui, cette ambition capte également, et avec le même intérêt, l’imbrication compétitive entre terre et mer, avec des corridors multimodaux interconnectés pour le Brésil et des plateformes de traitement logistique aux standards internationaux pour le Maroc (Tanger-Med et Dakhla-Atlantique).
Faisant remarquer que « cette convergence de vues entre le Maroc et le Brésil résonne comme une réminiscence de l’histoire », le diplomate marocain note que cette « histoire singulière entre le Maroc et le Brésil, commencée il y a plus de 150 ans, va évidemment écrire une nouvelle page, en investissant pleinement dans l’Atlantique et en optimisant ses multiples atouts et attraits, de l’économie bleue à la pêche durable, de l’océanographie à la coordination sécuritaire ».
« L’horizon qui pointe est que le Maroc et le Brésil seront à l’avant-garde d’une nouvelle articulation géopolitique de l’Atlantique et à l’avant-garde d’une corrélation géo-économique innovante entre les deux rives de cet espace à fort potentiel prometteur », conclut l’ambassadeur du Maroc à Brasilia.