Comme un vaisseau échoué dans un océan de lumière, la tente sacrée des cavaliers d’El Aounat dresse ses voiles ocre-indigo contre l’azur implacable du Moussem. Sous le commandement de Ghali Tounsi, ce palais d’étoffes et de vents devient l’architecte silencieux de l’émerveillement. Ses piliers de cèdre, mâts d’un navire immobile, portent des toiles où chaque motif géométrique tisse la cartographie des étoiles nomades.
Quand tombent les ombres, la métamorphose opère. La tente devient laboratoire d’or et d’obscurité : les fanous allument des constellations berbères, projetant sur les toiles l’ombre dansante des cavaliers. Spectacle hypnotique où chaque pli du tissu épouse les courbes du temps, où chaque nœud conte l’alliance de l’homme et de la mémoire vivante.
Éphémère cathédrale, elle n’est point faite pour durer, mais pour révéler l’éternel : ce moment où le patrimoine bédouin, tel un faucon libéré de son chaperon, fascine le siècle numérique. Les visiteurs, sidérés, y apprennent la grammaire secrète des Doukkala – où la beauté naît de l’utile, et le sublime de l’éphémère.