Situation hydrique : Fin de la phase « critique », mais la riposte se poursuit !

​Les réserves en eau des barrages ont atteint plus de 6,7 milliards de m³, soit plus de 40%. La phase critique est derrière, mais la riposte contre le stress hydrique se poursuit.

Après sept années consécutives de sécheresse, les mois de février et mars ont enfin apporté un répit salvateur à une grande partie du Royaume. Des précipitations généralisées ont touché presque toutes les régions, redonnant vie à des terres asséchées et ravivant l’espoir chez les habitants. Des montagnes de Chefchaouen aux plaines de Tan-Tan, en passant par Casablanca, Safi ou encore Guelmim, les pluies ont contribué à remplir plusieurs barrages stratégiques et à ressusciter certaines rivières à sec. Selon les dernières données du ministère de l’Équipement et de l’Eau, les réserves en eau des barrages ont atteint, au 20 avril 2025, un total de 6,7 milliards de m³, soit un taux de remplissage de 40,08%. «Un niveau inédit depuis plusieurs années», s’est félicité le ministre Nizar Baraka, mardi dernier, devant les parlementaires. Le bassin de Sebou se distingue par sa contribution majeure, enregistrant une hausse de plus de 922 millions de m³. Il est suivi par les bassins du Loukkos (+328 millions de m³), de l’Oum Er-Rbia (+315 millions de m³) et du Bouregreg (+248 millions de m³). D’autres bassins, comme celui de Souss-Massa (+49 millions de m³) ou de Guir-Ziz-Rhéris (+41,5 millions de m³), enregistrent également des augmentations notables. En revanche, les bassins de la Moulouya et du Tensift demeurent en situation préoccupante, avec des hausses respectives de seulement 6,5 et 13 millions de m³.
 
Une sortie de la zone rouge ?
 
Ces précipitations ont permis au Maroc de passer d’un stress hydrique aigu à une situation jugée modérée. Toutefois, le ministre Baraka a rappelé que les apports restent inférieurs de 25% à la moyenne saisonnière, et que les ressources hydriques globales accusent toujours un déficit de 58% par rapport à la normale, malgré une amélioration de 45% par rapport à la période précédente.
 
Sur le plan de l’approvisionnement, les pluies ont permis de garantir une sécurité en eau potable pour une durée estimée à un an et demi. «Les craintes d’un été critique sont désormais levées pour la majorité des bassins», a assuré Baraka, tout en précisant que les provinces du Sud restent confrontées à une situation particulière. Ces apports permettront également de renforcer les volumes dédiés à l’irrigation agricole. Des restrictions ont toutefois été imposées aux cultures les plus gourmandes en eau, en faveur de plantations plus adaptées aux conditions climatiques actuelles. La gestion de la ressource hydrique fait désormais l’objet de nouvelles orientations. Une rationalisation stricte de l’usage de l’eau a été mise en œuvre, notamment à travers des consignes de gestion des barrages et des lâchers restrictifs visant à limiter les pertes. Un nouveau cadre de gouvernance pour les nappes phréatiques a également vu le jour, basé sur des contrats de gestion participative afin d’enrayer leur surexploitation.
Dans cette perspective, la gestion de la demande, en particulier agricole, constitue une priorité pour le gouvernement. Des efforts de reconversion vers des systèmes d’irrigation localisée se poursuivent, tandis qu’une cartographie des assolements est en préparation, apprend-on de la tutelle. Elle permettra d’orienter les cultures selon la disponibilité réelle de l’eau, dans le but de préserver la souveraineté alimentaire du pays.
 

 

Riposte pour sécuriser l’avenir hydrique

 

 
Dans le droit fil des Orientations Royales, le ministère de l’Équipement et de l’Eau déploie une stratégie globale axée sur la diversification des sources d’approvisionnement et l’amélioration de l’efficience hydrique, en particulier dans le secteur agricole. L’accent est mis sur le développement des ressources non conventionnelles, notamment par le biais du dessalement.
 
Les chantiers de stations de dessalement avancent à un rythme soutenu, avec une capacité actuelle dépassant les 300 millions de m³, fruit d’une collaboration entre l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) et le Groupe OCP. À titre d’exemple, 80% de l’eau potable alimentant les provinces de Berrechid, Settat, Had Soualem et le Sud de Casablanca proviennent désormais de la station de Jorf Lasfar. La ville de Safi, elle, est entièrement approvisionnée par de l’eau dessalée.
 
Grâce à l’interconnexion hydraulique entre bassins et à l’apport du dessalement, l’approvisionnement en eau potable des régions d’Al-Haouz et de Marrakech est sécurisé jusqu’en mai 2026. De même, l’interconnexion entre les bassins du Sebou et du Bouregreg constitue un atout majeur pour dissiper les craintes liées à la disponibilité de l’eau.
 
Par ailleurs, le projet d’autoroute de l’eau reliant Oued Laou à Loukkos, puis à Oum Er-Rbia, avance. L’étude technique devrait être finalisée d’ici juin, et vise à résorber le déficit hydrique dans cette zone.
 
Pour maximiser la réutilisation des eaux usées, la capacité nationale de traitement atteindra 100 millions de m³ d’ici 2027, et 350 millions de m³ à l’horizon 2035. Ces volumes traités seront notamment destinés à l’irrigation des espaces verts et des infrastructures sportives.
 

 
 

Renforcement de l’arsenal juridique
Face aux défis liés à la sécheresse et à la pression sur les ressources hydriques, le Maroc renforce son arsenal juridique pour protéger le domaine public hydraulique. Le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, a détaillé les dispositifs encadrés par la loi n° 36.15, régissant forages, titres et licences. Une série de mesures a été engagée : création d’un guichet unique, plateforme électronique, campagnes de communication, et partenariat avec les autorités locales. Objectif : fluidifier l’octroi des licences, tout en encadrant rigoureusement leur délivrance, notamment dans les zones fragiles. Le nouveau décret en cours d’élaboration vise à moderniser davantage le cadre de gestion. Pour Baraka, la préservation des ressources passe par un équilibre entre efficacité administrative, rigueur législative et concertation territoriale.

Approvisionnement en eau potable
Le programme d’accès à l’eau potable en milieu rural au Maroc a connu des progrès notables, avec un taux de couverture passé de 14% en 1995 à plus de 98,8% aujourd’hui, grâce notamment au programme PAGER. En parallèle, et conformément aux Hautes Orientations Royales, le Programme national d’approvisionnement en eau potable et d’irrigation 2020-2027 (PNAEPI) consacre environ 27 milliards de dirhams à la consolidation de l’AEP en zone rurale. Ce financement permet la réalisation de projets structurants, la mise en place de points d’eau autonomes, l’installation de stations monoblocs de dessalement et de déminéralisation, ainsi que l’acquisition de camions-citernes pour renforcer l’approvisionnement.

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