Abdennabaoui : Les systèmes judiciaires appelés à accompagner l’expansion de l’IA et la transition numérique

​Le Premier président de la Cour de Cassation, président délégué du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, Mohamed Abdennabaoui, a affirmé, lundi à Casablanca, que les systèmes judiciaires sont appelés à accompagner l’expansion de l’intelligence artificielle (IA) et la transition numérique.

“La forte expansion de l’IA et la transition numérique que connaissent les systèmes économiques et industrielles opèrent des changements radicaux sur les schémas sociaux dominants et les transactions habituelles, ce qui confronte les systèmes de justice à travers le monde à d’énormes défis relevant des mutations numériques que ces systèmes se doivent d’accompagner et d’apporter les solutions idoines aux problématiques qu’elles engendrent”, a-t-il fait remarquer dans une allocution à l’ouverture du Congrès International du Groupe Africain relevant de l’Union Internationale des Magistrats (UIM), organisé par l’Amicale Hassania des Magistrats, sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI.

D’autant plus que “le système judicaire lui-même peut subir des changements structurels du fait de l’usage de l’IA dans le règlement des litiges”, a-t-il relevé, avant de noter qu’il est possible en conséquence de “se retrouver dans des situations étranges et complexes où l’indépendance du magistrat doit être repensée beaucoup plus en lien avec les applications numériques et leurs développeurs qu’avec le magistrat qui en fait l’usage”.

Par ailleurs, M. Abdennabaoui a indiqué que ce congrès, qui se tient sous le thème “Pour une justice africaine indépendante”, reflète “l’essence de la mission de la magistrature dans la réalisation de la justice et de l’équité. Et c’est le concept qui a été repris et encadré par la Constitution marocaine afin d’assurer la protection de l’indépendance du pouvoir judiciaire et la préservation de l’indépendance des magistrats eux-mêmes”.

Il a estimé que l’évocation de la question de l’indépendance du pouvoir judiciaire parmi tant d’autres sujets lors des travaux de ce congrès “ne doit pas se limiter à la discussion des principes de l’indépendance du pouvoir judiciaire, son fondement historique et sa légitimité” mais bien au-delà “en portant la réflexion sur les modes de mise à profit des expériences et des bonnes pratiques mises en place par les pays participants, l’unification des méthodes adoptées, la mise en place de critères et d’indicateurs communément admis, qui contribuent aux rehaussement de l’efficience judiciaire et à la consolidation du rôle de la justice en tant que pouvoir investi de la protection des droits et libertés des citoyens et de leur sécurité judiciaire dans le cadre du respect total des spécificités des systèmes judiciaires des pays membres”.

Et de suggérer aux participants à ce congrès de réfléchir sur “la création d’une commission africaine pour l’efficacité de la justice”, qui “serait investie de la réalisation des études sur les systèmes judiciaires des pays membres et la mise en place d’indicateurs de performance judiciaire pouvant guider les pays dans l’amélioration de leurs systèmes judiciaires et le renforcement de l’indépendance de leur pouvoir judiciaire”.

Pour sa part, le Procureur général du Roi près la Cour de Cassation, président du Ministère Public, El Hassan Daki, a déclaré que l’organisation de ce congrès “illustre de manière effective la mutualisation des efforts des systèmes judiciaires africains en faveur de l’indépendance de la justice à travers le resserrement de la coopération et l’implication de tous les magistrats”.

“Cet événement international d’envergure revêt une importance cruciale au vu de son actualité lancinante et aussi en raison de sa contribution à l’amélioration du fonctionnement de la justice au profit des justiciables et ce, à l’appui des expériences et bonnes pratiques partagées ainsi que les recommandations qui seront suggérées face aux défis posés dans la perspective d’améliorer l’efficience judiciaire dans le Royaume et sur le plan continental”, a-t-il dit.

Et d’ajouter que ce congrès se tient dans un contexte marqué par la réalisation d’acquis importants au Maroc en faveur de l’indépendance de la justice, résultat de la réforme du système judiciaire.

M. Daki a, par ailleurs, relevé que le Ministère public veille à nouer des relations de coopération avec l’ensemble des parquets africains à l’appui de mémorandums d’entente, et ce, dans le cadre d’une diplomatie judiciaire durable qui a permis de mieux faire connaître les évolutions que connaît le Royaume sur les plans juridique et judiciaire.

Autre intervenant, le président de l’Amicale Hassania des Magistrats, Mohamed Redouane, qui a indiqué que “ce congrès est l’occasion d’échanger les expériences et d’unifier les visions et les objectifs dans le but d’élever la justice, et avec elle le système judiciaire dans son ensemble, aux plus hauts niveaux, afin qu’elle devienne, à l’échelle de notre continent, une locomotive puissante pour la préservation des droits et la réalisation d’un développement continental durable dans toutes ses dimensions”.

Tout en indiquant que cette rencontre s’inscrit dans un contexte d’intérêt africain affirmé pour la question du développement commun et de la coopération dans divers secteurs, il a noté que cette rencontre abordera des questions cruciales auxquelles le continent africain est confronté dans ses efforts pour instaurer la justice et consolider l’État de droit, condition essentielle pour assurer la croissance et la prospérité que méritent ses peuples, riches de leurs ressources humaines et naturelles.

Dans ce même contexte, il a souligné que l’Initiative Royale pour l’Atlantique qui reflète la volonté de SM le Roi de faire de cette façade maritime un espace africain stratégique et un pôle de complémentarité économique et de rayonnement sur les plans continental et international, est l’occasion de mener une sérieuse réflexion sur la création d’un bloc atlantique engagé en faveur de la consécration de la justice et des droits de l’Homme en Afrique.

L’ouverture des travaux de congrès, organisé en coordination avec l’Union Internationale des Magistrats et le Groupe Africain y relevant, a été marquée par la présence notamment du Secrétaire d’Etat chargé de l’Emploi, Hicham Sabiry, du Wali de la région de Casablanca-Settat, gouverneur de la préfecture de Casablanca, Mohamed Mhidia, ainsi qu’un parterre de responsables judiciaires représentant une vingtaine de pays africains.

Ce congrès, qui se tient jusqu’au 24 avril courant, est considéré par ses organisateurs comme un moyen de renforcer la coopération judiciaire Sud-Sud et un forum de dialogue et de réflexion sur les questions relatives à la justice dans le continent.

Il est aussi, selon eux, une occasion de promouvoir la formation judiciaire commune, d’échanger les bonnes pratiques et aussi de consolider la coopération entre les systèmes judiciaires africains et ce, dans l’objectif de construire un espace juridique africain commun face aux défis posés, entre autres, par l’immigration illégale, la criminalité transfrontalière, les questions environnementales ou encore les mutations numériques.

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