Trois axes prioritaires sont nécessaires pour les économies subsahariennes : rétablir et soutenir la stabilité macroéconomique, la politique budgétaire comme levier d’inclusion, l’accélération des réformes structurelles pour une croissance durable et inclusive. Le nouveau rapport de la BM et du FMI table déjà sur une croissance régionale, dans cette partie du monde, de 3,5% en 2025, suivie d’une accélération, plus marquée, pour atteindre 4,3% en 2026-2027. Grilles de lecture.
Cette dynamique, expliquent-ils, serait portée principalement par la hausse de la consommation privée et des investissements, à la faveur du repli de l’inflation et de la stabilisation monétaire. D’ailleurs, le taux d’inflation médian dans la région est passé de 7,1% en 2023 à 4,5% en 2024. Dans cette 31ème édition du rapport Africa’s Pulse, intitulée : «Améliorer la gouvernance et répondre aux besoins des populations en Afrique », il ressort, cependant, que ce rythme de la croissance n’est pas encore suffisant pour réduire, de manière significative, la pauvreté et répondre aux aspirations des citoyens.
En outre, un autre constat général est fait : puisqu’en 2025, le revenu réel par habitant devrait être inférieur d’environ 2% au pic qu’il avait atteint en 2015. Pis, la croissance dans les pays riches en ressources et ceux en situation de fragilité, de conflit et de violence est plus lente que dans les économies plus diversifiées. D’autant plus que la région peine à créer suffisamment d’emplois de qualité pour sa jeunesse.
Ce qui fait dire à Andrew Dabalen, Economiste en chef de la BM pour l’Afrique, que l’écart se creuse entre, d’une part, les aspirations des populations à des emplois de qualité et à des services publics efficaces et, d’autre part, des institutions et des marchés souvent défaillants. Face à cette situation, soutient-il, il sera essentiel de mener des réformes urgentes, doublées d’un renforcement de la concurrence, de la transparence et de la redevabilité. L’objectif est d’attirer les investissements privés, augmenter les recettes publiques et créer davantage d’opportunités économiques pour les millions d’Africains qui entrent sur le marché du travail chaque année.
Bien que les événements récents aient eu raison de la reprise économique, l’activité économique a été supérieure aux attentes en 2024, permettant d’afficher une croissance régionale soutenue. Ainsi grâce à des politiques plus judicieuses, les déséquilibres macroéconomiques se sont réduits, avec en particulier un ralentissement de l’inflation et une stabilisation de la dette publique. Résultat : le ratio dette/PIB médian s’est maintenu au-dessous de 60%.
Sur un autre registre, au moment où les effets directs et indirects des changements dans les politiques commerciales vont se matérialiser et évoluer au fil du temps, les économies africaines ont la possibilité de se libéraliser. Elles peuvent aussi diversifier leurs marchés, notamment en s’appuyant sur la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) pour stimuler le commerce régional, développer l’activité économique et procurer des emplois aux jeunes.
Concernant les disparités entre pays africains dans le rapport, Amadou Nicolas Racine Sy, économiste et conseiller du directeur dans le département Afrique du FMI, est assez explicite. En effet, note-t-il, malgré une dégradation moyenne, les performances varient considérablement, relevant que onze des vingt économies mondiales à la croissance la plus rapide en 2025 sont en Afrique subsaharienne.
Il ressort, dans son analyse, qu’en 2024, le Niger et le Rwanda ont affiché les taux de croissance les plus élevés de la région. Racine Sy ajoute que d’autres pays, comme le Bénin, l’Éthiopie, la République démocratique du Congo, la Guinée, le Sénégal et l’Ouganda, ont enregistré des croissances supérieures à 6%, principalement grâce à des économies diversifiées, sauf pour la RDC et, dans une moindre mesure, la Guinée.
À l’inverse, fait remarquer le responsable du FMI, les pays avec une croissance inférieure à 2% incluent le Botswana, la République centrafricaine, le Tchad, la Guinée équatoriale, Sao Tomé-et-Principe, l’Afrique du Sud, le Soudan du Sud et le Zimbabwe. Les pays riches en ressources naturelles, notamment les exportateurs de pétrole, affichent une croissance faible.
Le FMI, devant les économies très vulnérables aux chocs externes, sur lesquels les décideurs ont peu de contrôle, recommande la réduction de ces vulnérabilités macroéconomiques tout en répondant aux besoins de développement, dans un cadre socialement et politiquement acceptable. Il s’agit d’un équilibre délicat, reconnait l’institution financière internationale.
Pour ce faire, il faut calibrer les politiques macroéconomiques et constituer des marges de manœuvre, comme des réserves budgétaires, même si cela est politiquement difficile. Comme l’a dit une ancienne directrice du FMI, «il faut réparer le toit quand le soleil brille».Constituer ces coussins de sécurité, par exemple en limitant les dépenses lors de hausses temporaires des revenus pétroliers, pourrait constituer une assurance contre les chocs.
Mais dans cette démarche, conclut le rapport, les gouvernements ne sont pas seuls, car il y a le FMI, la BM, la BAD et d’autres partenaires qui jouent un rôle de soutien et d’accompagnement. Mais le secteur privé, y compris les PME, doit être mobilisé en réduisant les obstacles réglementaires. Face à une croissance démographique rapide et aux besoins des jeunes en éducation et santé, accélérer ces réformes est impératif.