Longtemps pénalisées par des critères d’éligibilité restrictifs, les très petites, petites et moyennes entreprises (TPME) pourraient enfin voir s’ouvrir les vannes du financement bancaire. Entre la baisse du taux directeur, un programme dédié annoncé par Bank Al-Maghrib (BAM) et la refonte d’Intelaka, un ensemble de mesures se met en place pour leur faciliter l’accès au crédit.
Cette situation anormale avait même été soulevée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI qui, lors du discours du 11 octobre 2019 à l’occasion de la rentrée parlementaire, avait regretté que les banques marocaines ne soutiennent pas suffisamment certaines catégories, comme les jeunes entrepreneurs et les TPME, et avait appelé à “simplifier et faciliter les procédures d’accès au crédit, s’ouvrir davantage aux autoentrepreneurs, financer les petites et moyennes entreprises”.
Alors que tous les indicateurs économiques et financiers du pays sont au vert, le Conseil de la banque centrale, réuni lors de sa session trimestrielle du 18 mars, a décidé de donner un nouvel élan aux TPME à travers une initiative inédite. En parallèle à la baisse du taux directeur de 25 points de base, le ramenant à 2,25% pour dynamiser l’activité économique et soutenir l’emploi, le Wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, a annoncé la mise en place d’un programme dédié au financement des très petites entreprises (TPE).
Ce programme prévoit un mécanisme de refinancement des banques participantes à des conditions avantageuses, avec un taux préférentiel équivalent au taux directeur réduit de 25 points de base. L’enjeu est d’élargir l’accès au crédit pour ces entreprises, et de renforcer leur contribution à la création d’emplois.
Dans cette perspective, le Wali de BAM a annoncé qu’une première réunion avec les banques s’était tenue le 6 mars, au cours de laquelle ces dernières ont réaffirmé leur engagement en faveur des TPE, mettant en avant leur volonté de renforcer leur accompagnement et de faciliter l’accès au crédit pour ces entreprises.
Par ailleurs, BAM prévoit d’ici juin une réunion tripartite avec la CGEM et les banques pour identifier les obstacles qui freinent le financement des TPME et élaborer des solutions adaptées. L’objectif est d’améliorer l’accès au crédit, de fluidifier les mécanismes de financement et d’accompagner ces entreprises dans leur croissance, avec un impact direct sur la dynamique économique et la création d’emplois.
Le Wali a également annoncé une refonte du programme Intelaka afin de l’ajuster aux nouvelles réalités économiques, en insistant sur l’importance d’un suivi renforcé des TPE, aussi bien avant leur lancement qu’au cours de leur développement.
Ce dispositif cible les entreprises dont le chiffre d’affaires se situe entre 1 et 200 millions de dirhams. Pour être éligible à cet accompagnement, le projet d’investissement doit quant à lui s’inscrire dans une fourchette allant de 1 à 50 millions de dirhams.
Soufiane CHAHID
En quoi le dispositif annoncé par BAM sera-t-il différent des précédents ?
Comment, selon vous, leur donner un meilleur accès à ces financements ?
La concurrence déloyale du secteur informel nuit fortement à leur compétitivité, créant un déséquilibre face aux entreprises respectant les normes légales. Le manque de ressources humaines qualifiées limite leur capacité d’innovation et de croissance. La corruption, en augmentant les coûts et l’incertitude, constitue une entrave supplémentaire.
Le cadre fiscal, jugé complexe et contraignant, décourage l’investissement et la formalisation des petites structures. L’accès au financement, souvent difficile, reste un défi majeur en raison des garanties élevées exigées par les banques et des taux d’intérêt peu avantageux.
L’étude préconise une meilleure régulation du secteur informel, une réforme de la formation professionnelle, une simplification fiscale et un accès facilité au crédit pour permettre aux TPME de jouer pleinement leur rôle dans l’économie marocaine.
Ce mécanisme s’adresse aux entreprises viables confrontées à des difficultés passagères, telles que des tensions de trésorerie, une baisse d’activité, un déséquilibre financier, une perte de clients ou encore des arriérés envers des organismes publics ou privés. Pour être éligibles, les entreprises ne doivent pas être classées comme débiteurs douteux ou compromis auprès des établissements de crédit et leur chiffre d’affaires ne doit pas excéder 175 millions de dirhams.
Le dispositif cible en priorité les entreprises industrielles et celles orientées vers l’export. Il couvre plusieurs types de besoins, notamment les investissements, la restructuration financière et les crédits d’exploitation, qu’ils soient amortissables ou sous forme de crédit revolving.
La part du Fonds de soutien aux TPME prend la forme d’un prêt subordonné, plafonné à 50 millions de dirhams. De son côté, la banque peut accorder des concours pour financer les investissements, l’exploitation ou encore la restructuration de créances existantes. La part bancaire peut également bénéficier de la garantie de Tamwilcom.
Le prêt accordé par le Fonds a une durée maximale de 10 ans, incluant une éventuelle période de différé. Son remboursement intervient après celui des concours bancaires. Le taux d’intérêt appliqué à la part du Fonds est fixe et correspond au taux moyen pondéré des émissions des bons du Trésor à 5 ans, tel que publié par BAM. La part bancaire est librement négociable, mais ne peut dépasser le taux appliqué à la part du Fonds, majoré de 150 points de base.