Alger snobe Moscou : la brouille silencieuse entre Tebboune et le Kremlin

Il fallait bien s’y attendre. L’intention de Moscou d’adhérer à la proposition du plan d’autonomie du Sahara occidental sous souveraineté marocaine ne pouvait laisser le régime d’Alger indifférent.

Alors que quatre-vingt-quatre nations se sont pressées, cette semaine, à Moscou pour participer à la Semaine mondiale de l’énergie, l’un des plus prestigieux rendez-vous consacrés à l’avenir énergétique de la planète, l’Algérie a choisi l’absence. Aucun représentant, aucune délégation, pas même un simple envoyé du ministère de l’Énergie. Une consigne directe, venue du sommet du pouvoir : Abdelmadjid Tebboune a ordonné le boycott.

Derrière ce geste en apparence anodin, se cache un acte politique de défiance à l’égard de la Russie. Selon plusieurs sources diplomatiques, Alger a voulu marquer sa colère face aux prises de position récentes du Kremlin sur deux dossiers explosifs : le Sahara occidental et le nord du Mali — deux terrains où l’Algérie estime détenir un rôle d’arbitre régional incontestable.

Le coup de tonnerre du Sahara
Moscou devrait selon plusieurs indices enfin affirmer son appui au plan d’autonomie marocain sous souveraineté du Royaume, une orientation désormais assumée par une majorité de puissances mondiales. Pour Alger, c’est une véritable trahison : la Russie, alliée historique et fournisseur d’armes stratégique, prendrait ainsi ses distances avec la ligne “anti-marocaine” qui cimentait depuis des décennies l’axe Alger-Moscou.

Furieux, le régime a réagi par le silence diplomatique : aucune présence algérienne au forum de Moscou, en guise de message à peine voilé. Le pouvoir de Tebboune et du général Saïd Chengriha n’a pas supporté ce qu’il considère comme une humiliation géopolitique — un désaveu symbolique de ses ambitions régionales et de sa propagande “anti-impérialiste”.

Le Mali, l’autre fracture
Mais la fracture va bien au-delà du Sahara. Les tensions se sont également nourries du regard critique du Kremlin sur le rôle ambigu de l’Algérie dans le nord du Mali. Plusieurs rapports, tant africains qu’occidentaux, font état d’ingérences sécuritaires algériennes dans la région : financement de réseaux paramilitaires, appuis logistiques à des groupes armés, voire tolérance tacite à certaines organisations terroristes locales.

La Russie, désormais omniprésente au Sahel à travers son bras armé “Africa Corps”, héritier du groupe Wagner, n’entend plus laisser à Alger le monopole du terrain. Les intérêts se chevauchent, les influences s’affrontent : d’un côté, le vieil appareil militaire algérien, nostalgique de son rôle de “gendarme du désert” ; de l’autre, une Russie pragmatique, qui avance ses pions économiques et sécuritaires sans état d’âme.

Une absence qui en dit long
Ainsi, l’absence algérienne à Moscou résonne comme une déclaration de mécontentement, mais aussi comme un aveu de faiblesse diplomatique. Pendant que les grandes puissances et les géants de l’énergie – de l’Arabie saoudite à la Turquie, en passant par l’OPEP – débattent de la sécurité d’approvisionnement, des énergies renouvelables et de la coopération mondiale, Alger s’isole davantage, prisonnière de ses rancunes et de ses illusions stratégiques.

La Semaine mondiale de l’énergie, qui s’est tenue du 15 au 17 octobre au Centre des expositions Manège, a réuni autour du Kremlin les décideurs de 84 pays, parmi lesquels et non des moindres, le prince Abdelaziz ben Selmane, ministre de l’Énergie saoudien, Alparslan Bayraktar, ministre turc de l’Énergie, et Haitham Al Ghais, secrétaire général de l’OPEP. Tous y voient l’opportunité de repenser l’avenir énergétique mondial en l’absence remarquée d’une Algérie boudeuse, enfermée dans sa diplomatie de susceptibilités et désormais effacée de l’échiquier géopolitique mondial.

À propos

Check Also

Biodiversité : Quand le Maroc prend les rapaces sous son aile [INTÉGRAL]

Présentée à Abou Dhabi, la Stratégie nationale pour la conservation des oiseaux de proie place …

Laisser un commentaire