El Jadida : la démolition des cabines de Deauville ou la dissolution d’une strate mémorielle

L’ordre de démolition qui plane sur les cabines de la plage Deauville ne signe pas seulement la disparition programmée d’un équipement balnéaire ; il scelle l’effritement d’un chapitre entier de la chronique jdidie. Ces structures, par leur nomenclature même – « Deauville » –, portaient en elles le récit d’une époque et l’ambition d’une station balnéaire se rêvant en rivale des joyaux atlantiques.

Leur éventuel anéantissement représente bien plus qu’une mise à nu du paysage : c’est un palimpseste dont on gratterait la dernière inscription, un fragment d’identité urbaine qui se défait. Ces cabines constituaient la charpente tangible d’une sociabilité spécifique, celle des après-midi ensoleillés, des rituels familiaux et des horizons partagés. Leur disparition crée une béance dans la continuité narrative de la ville, une faille où se perd le murmure des générations.

El Jadida se trouve ainsi confrontée à un paradoxe moderne : comment écrire son futur sans oblitérer les pages déjà rédigées de son histoire ? La plage Deauville, une fois amputée de ses emblèmes, risque de n’être plus qu’un territoire amnésique, un lieu sans épaisseur temporelle. La ville, dans son dialogue avec la mer, perdrait l’un de ses accents les plus caractéristiques.

Cette métamorphose forcée interroge la valeur que nous accordons à ces patrimoines modestes, ces archives de l’ordinaire qui, pour être faites de bois et de peinture, n’en sont pas moins les gardiennes de notre substance collective. Leur effacement sonne comme un rappel : la mémoire, une fois dispersée, ne se reconstitue pas.
 

Mohamed LOKHNATI

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