Qualifiée de signe de l’engagement du pays envers l’intégration africaine et une tentative de renforcer son influence régionale, la décision du gouvernement du Burkina Faso d’instaurer le visa gratuit pour les ressortissants africains est une initiative audacieuse et symboliquement forte. Il emboîte ainsi le pas au Rwanda, le Bénin, le Ghana et les Seychelles. Cependant, gratuité ne veut pas dire exemption de visa.
Mais à peine annoncée, cette nouvelle ne fait pas la joie de tout le monde. Car pour une certaine catégorie d’individu, l’Afrique doit rester barricadée ou cloitrée entre ses quatre murs, attisant ainsi la division et la séparation entre les populations. D’autres parlent même d’un effet d’annonce purement politicienne pour cacher les difficultés d’un régime en proie au terrorisme et d’une «mal gouvernance» ou encore de la «misère».
Les plus cyniques vont jusqu’à dire que cette décision masque «la volonté d’un régime militaire incapable d’organiser des élections afin de passer la main aux civils». A la lecture de ces quelques pamphlets, on comprendra que la vision du président IB dérange à plus d’un titre. Autrefois qualifié de pays pauvre, sans ressources de sol et de sous-sol, le Burkina Faso est aujourd’hui classé parmi ceux du continent les plus riches.
En la matière, le sous-sol du Burkina Faso recèle d’importantes ressources minières, principalement l’or, le manganèse, le zinc, le cuivre, et le phosphate. D’autres gisements incluent des calcaires, des marbres, ainsi que des indices de diamant, bauxite, nickel, et vanadium. Résultat des courses : les investisseurs courent au portillon pour s’installer et développer leurs affaires à Ouagadougou et dans d’autres villes du pays. C’est dire que cette démarche du gouvernement burkinabè n’est pas un hasard ou un calcul politicien pour une quelconque confiscation du pouvoir contrairement à ses détracteurs.
En s’inscrivant dans cette dynamique d’intégration continentale, le Burkina emboîte le pas au Rwanda, au Bénin, au Ghana et aux Seychelles. En effet, en 2013, le Rwanda a été l’un des premiers pays à prendre une mesure audacieuse en supprimant les visas d’entrée pour tous les citoyens africains. Cette politique a été largement saluée comme un acte de panafricanisme, s’alignant sur la vision d’un continent sans frontières.
Pour ce qui est du Bénin, il a suivi l’exemple du Rwanda, en 2017, marquant un tournant majeur dans la politique d’ouverture du pays. Cette décision a été considérée comme un message fort en faveur de l’intégration régionale et de la libre circulation des biens et des personnes.
Concernant le Ghana, il a levé l’exigence de visa pour tous les citoyens africains à partir du 1er janvier 2025, en mettant en place des politiques d’exemption de visa progressives, notamment pour les citoyens de la CEDEAO, avant de généraliser cette mesure à la majorité des pays africains.
Quant aux Seychelles, cet archipel a longtemps été un précurseur en matière d’ouverture, offrant une exemption de visa aux citoyens de presque tous les pays du monde, ce qui en fait une destination très accessible pour les ressortissants africains.
Pour les panafricains et partisans de la fraternité, les autorités burkinabè ont présenté la mesure comme une étape historique s’inscrivant dans la vision panafricaniste du Capitaine Ibrahim Traoré. L’objectif est de «raffermir les liens de fraternité» entre les peuples du continent.
D’autres affirment que cette décision est saluée comme un acte symbolique fort qui vise à affirmer la souveraineté du Burkina Faso et sa volonté de bâtir des ponts plutôt que des frontières.
Du côté des observateurs proches de l’Alliance des États du Sahel (AES), cette mesure est un pas concret vers la consolidation du bloc régional, contrastant avec la politique de fermeture de certaines frontières. Enfin, si la mesure est un geste politique fort, ses commentaires sont polarisés entre l’idéal panafricaniste et la réalité des défis sécuritaires et économiques sur le terrain. Toujours est-il que le Burkina vient de franchir un grand pas dans l’intégration africaine.