L’océan Atlantique, souvent perçu comme une simple étendue d’eau séparant les continents, est en réalité un espace géopolitique dynamique et, dans sa partie sud, un catalyseur inexploité pour de nouvelles dynamiques mondiales. Au cœur de cette transformation se trouve le Royaume du Maroc, qui, grâce à sa position stratégique, est en train de redéfinir ses relations avec l’Amérique latine, ouvrant la voie à un renforcement significatif des échanges politiques et économiques dans le Sud global.
Cependant, la géopolitique actuelle est marquée par l’émergence du Sud dans les relations internationales et d’importants changements économiques et démographiques autour de l’Atlantique. Il est désormais opportun d’élargir la perspective en explorant la «dimension verticale» de l’Atlantique, y compris sa moitié sud, ajoute le rapport. Cette approche permet de considérer l’ensemble de la région non seulement géographiquement, mais aussi comme un espace géostratégique et géo-économique avec ses propres enjeux et défis. Dans ce contexte, la construction d’une relation solide entre le Maroc et les pays d’Amérique latine autour de l’Atlantique Sud peut servir de catalyseur et d’accélérateur pour les échanges politiques et économiques. Les relations entre le Maroc et cette partie du continent sud-américain ont déjà connu un changement notable depuis la visite historique de Sa Majesté le Roi Mohammed VI en 2004, qui a insufflé une nouvelle dynamique aux liens avec des pays comme le Mexique, le Pérou, le Brésil, l’Argentine et le Chili dans les domaines politique, économique, commercial et culturel, note le Policy center.
Les idéologies révolutionnaires et anticoloniales des années 1960, qui s’alignaient sur la «République sahraouie» fantomatique, cèdent de plus en plus la place à des discours pragmatiques basés sur le respect mutuel et les intérêts économiques communs, s’alignant ainsi sur la position du Royaume du Maroc. Les clivages politiques et les dynamiques internes en Amérique latine appellent désormais à une approche au cas par cas et à une connaissance plus approfondie de la région. La création d’un espace géopolitique commun entre l’Amérique latine et le Maroc est une stratégie envisagée pour établir des plateformes de dialogue et des marqueurs d’identité partagés. Le caractère fédérateur de l’Atlantique, avec sa portée politique dans les questions de changement climatique, d’énergies renouvelables et de sécurité internationale, peut devenir un puissant vecteur pour intensifier les relations entre le Maroc et ses voisins de l’autre rive. Le renforcement des liens économiques transatlantiques est une stratégie gagnante pour le Maroc, qui voit de nouvelles dynamiques émerger avec le continent américain. Plusieurs pays d’Amérique latine reconsidèrent leur position politique vis-à-vis du Maroc à la lumière des récentes avancées géoéconomiques et géopolitques du pays. Au niveau multilatéral, l’a rmation du caractère atlantique commun pourrait catalyser la construction d’un avenir partagé et la création d’un espace de coopération propice aux échanges économiques et politiques avec l’Amérique latine.
Repenser et affirmer l’appartenance atlantique du Maroc pourrait s’avérer bénéfique sur le plan géopolitique, en créant un cadre de coopération commun entre les deux rives de l’océan. Avec de nombreux verrous stratégiques à l’Est et au Sud, le potentiel de développement d’une doctrine atlantique aux niveaux politico-militaire et socio-économique est judicieux. Le développement d’une industrie pérenne et l’investissement dans des pays d’Amérique latine à fort potentiel pourraient représenter une belle ouverture pour le tissu économique marocain, jetant les bases d’une relation renouvelée qui conduirait à une stabilité politique et économique dans l’espace atlantique, prélude à sa conceptualisation comme zone de coopération Sud-Sud et d’échange.
La récente percée de la diplomatie marocaine en Amérique latine n’est ni anecdotique ni fortuite, mais le fruit d’un long travail de diplomatie officielle, parallèle et économique visant à faire connaître les positions et les atouts du Maroc dans les différents pays de la région. L’Uruguay, le premier pays latino-américain à établir des relations diplomatiques avec le Maroc en 1959, a engagé une nouvelle dynamique avec Rabat, considérant le Maroc comme une porte d’entrée vers les marchés africains et le monde arabe. Cette avancée est le résultat d’une diplomatie entreprenante et multidimensionnelle.
En plus des efforts des ambassades, des actions de diplomatie parallèle, soutenues et de longue haleine, sont entreprises par les deux Chambres du Parlement et des composantes de la société civile. L’exemple du Brésil, un géant latino-américain et allié historique du Maroc, est édi ant : les exportations de produits marocains vers le Brésil ont connu une hausse phénoménale, passant de 655 millions de dollars US en 2016 à 2,05 milliards de dollars US en 2022. Cet exemple de relations maroco-brésiliennes devrait être reproduit avec d’autres pays d’Amérique latine comme base de la construction d’une interdépendance vertueuse. De même, les échanges commerciaux avec l’Argentine ont atteint 1,5 milliard de dollars US en 2022, soit une augmentation de 48% par rapport à 2021.
Cette stratégie de construction de relations saines basées sur les échanges économiques peut s’avérer fructueuse même avec des pays qui ne sont pas traditionnellement acquis à la cause du Maroc.