Au Maroc, le numérique est perçu comme une opportunité d’intégration dans l’économie mondiale. Mais au lieu d’un débat enrichi par des analyses rigoureuses, on assiste à une avalanche de discours creux où l’innovation se résume à des mots à la mode et des promesses irréalistes. L’intelligence artificielle est souvent réduite à quelques démonstrations spectaculaires, sans véritable compréhension de son fonctionnement ni de son impact sur l’économie et la société. Les véritables experts, ceux qui possèdent une vision systémique du numérique, sont relégués à l’arrière-plan, considérés comme trop techniques ou trop complexes pour un public qui préfère des concepts simplifiés.
En France, la situation est similaire. L’intelligence artificielle, la cybersécurité et la transformation digitale sont devenues des sujets dominés par des figures médiatiques plus soucieuses de leur visibilité que de la pertinence de leur discours. Le marché du conseil numérique s’est transformé en une arène où l’apparence et le marketing priment sur la connaissance approfondie. Les décideurs, sous la pression du court terme, se laissent séduire par ces figures bruyantes, au détriment des véritables spécialistes, qui peinent à se faire entendre.
Cette domination des pseudo-experts a des conséquences lourdes : une mauvaise orientation des politiques numériques et des stratégies d’entreprises. Les décisions sont prises en fonction de tendances éphémères et non d’analyses rigoureuses. L’absence d’un véritable débat scientifique et stratégique autour de ces sujets risque d’affaiblir les capacités d’innovation et de développement technologique de nos sociétés.
Ainsi, des deux côtés de la mer, c’est le bruit des ignorants qui domine. Ceux qui ont une voix mais pas le savoir. Ceux qui influencent mais ne comprennent pas. Ceux qui vendent des illusions plutôt que des solutions. Et pendant ce temps, les véritables experts, ceux qui pourraient orienter le Maroc et la France vers une souveraineté numérique et une véritable intégration du digital, restent dans l’ombre. Trop discrets. Trop préoccupés par l’exactitude plutôt que par la mise en scène.
Face à cette réalité, une question demeure : jusqu’à quand ces sociétés laisseront-elles leur avenir numérique et leur compréhension de l’IA être façonnés par ceux qui ne les maîtrisent pas ? Il est urgent de réhabiliter l’expertise et la rigueur dans le débat numérique, sous peine de voir l’innovation devenir un mirage vidé de son sens. Pour construire un avenir numérique solide, il est essentiel de remettre les connaissances, l’expérience et la réflexion critique au centre des décisions.