L’effondrement d’un immeuble ravive les inquiétudes des Casablancais

L’immeuble qui s’est récemment effondré à Mers Sultan, à Casablanca, a relancé l’alerte sur les bâtis menaçant ruine. Mais encore?


Il y a quelques jours, Casablanca s’est réveillée sous le choc. Dans le quartier de Mers Sultan, un immeuble s’est partiellement effondré en pleine nuit, provoquant une panique généralisée parmi les habitants. La façade latérale du toit s’est brutalement affaissée, bloquant entièrement la ruelle 33 sous les gravats et endommageant les habitations voisines. Si l’accident n’a pas fait de victime, c’est uniquement parce qu’il s’est produit en dehors des heures de forte affluence. Une chance, dans ce quartier très fréquenté en journée, notamment pour ses nombreux commerces de prêt-à-porter.

Les premières constatations pointent les fortes pluies récentes comme facteur déclencheur. Mais elles ne suffisent pas à expliquer l’effondrement à elles seules. À Mers Sultan, comme dans d’autres quartiers de la métropole, la vétusté du bâti est un problème chronique. D’après les autorités de l’arrondissement, plus de 1.100 immeubles y ont déjà fait l’objet de décisions de démolition partielle, totale ou de travaux de renforcement, en attente de l’intervention d’experts agréés. À Casablanca, ce sont plus de 5.000 bâtiments qui sont considérés comme menaçant ruine.

Cet état de fragilité s’explique en grande partie par les techniques de construction traditionnelles utilisées dans les années 1950 et 1960, souvent en marge des normes et sans supervision rigoureuse. Les constructions anarchiques, issues de cette époque, sont aujourd’hui à l’origine d’une série noire d’effondrements, dont Mers Sultan paie le prix fort depuis plusieurs années.

Si les interventions d’urgence des autorités sécuritaires sont systématiques à chaque effondrement, le problème de fond reste entier. Le conseil de l’arrondissement alerte notamment sur la grande pénurie de logements de remplacement, freinant les opérations de démolition de bâtiments pourtant identifiés comme dangereux.

La réglementation est pourtant claire. Selon le code en vigueur, un bâtiment menaçant ruine est défini comme toute construction dont l’état peut porter atteinte à la sécurité de ses occupants, des passants ou des structures environnantes. La responsabilité de son entretien incombe aux propriétaires, qu’ils soient privés ou publics. En cas de danger, ils sont tenus de prendre des mesures urgentes pour faire cesser le risque, sous peine de voir leur responsabilité engagée.

Un responsable du Conseil communal précise : « Lorsqu’une construction menace ruine, le propriétaire ou l’exploitant doit prendre les mesures nécessaires et urgentes afin de faire cesser le danger». Si le bâtiment est loué, la loi autorise même, en cas de danger avéré, la résiliation du bail et l’évacuation des locataires sans indemnité, par décision du tribunal.

Mais sur le terrain, la mise en œuvre de ces dispositions se heurte à une réalité complexe: nombre de propriétaires sont absents, insolvables ou réticents à engager des travaux coûteux. Quant aux habitants, ils vivent chaque jour avec la peur que le toit leur tombe sur la tête.

Repenser les politiques de relogement
L’épisode de Mers Sultan vient rappeler l’urgence d’une rénovation urbaine massive à Casablanca, car il est question de repenser en profondeur les politiques de gestion du bâti ancien de la Métropole. La réhabilitation des quartiers dégradés, souvent laissés en marge des grands projets de modernisation urbaine, doit devenir une priorité stratégique. Cela implique non seulement la démolition des structures les plus dangereuses, mais aussi la reconstruction dans le respect des normes de sécurité et d’urbanisme actuelles, la restauration des bâtiments patrimoniaux, et l’amélioration des infrastructures de base : voirie, assainissement, éclairage public. Car derrière chaque immeuble menaçant ruine, ce sont des familles entières qui vivent dans la peur, sans alternative de relogement.

À propos

Check Also

Salon – Mondial de l’auto 2026, de grandes marques pourraient faire leur retour

Serge Gachot, directeur du Mondial de l’auto, pousse pour attirer plus de marques automobiles à …