À Mohammedia, l’éclairage public devient un enjeu de sécurité et d’équité face à l’obscurité persistante de certains quartiers. Mais encore?
À Hay Errazi, quartier densément peuplé situé à la lisière du centre-ville, les lampadaires fonctionnent par intermittence. Nadia, mère de deux enfants, raconte à quel point cette situation l’inquiète : « À la sortie de l’école, en hiver, il fait presque nuit. Quand l’éclairage ne marche pas, on a peur. Les enfants doivent passer par des ruelles sombres, et il y a eu plusieurs cas de harcèlement. On a signalé le problème plusieurs fois, mais les réparations sont lentes, quand elles arrivent. » Elle dit éviter certains trajets, même en voiture, à cause du manque de visibilité. Pour elle, la lumière est un droit, pas un luxe.
À quelques kilomètres de là, dans le quartier plus récent de Sidi Moussa, l’éclairage est omniprésent. Mohamed, livreur à moto et militant pour la sécurité routière, y voit plus qu’un simple confort visuel : « Là où il y a de la lumière, il y a de la vie. Les gens sortent, les commerces restent ouverts, les agressions diminuent. Ce n’est pas un hasard. L’éclairage public, c’est un outil de justice sociale. Il montre que les autorités se soucient des citoyens, même après le coucher du soleil».
Au Conseil communal, on reconnaît l’importance de la question. Le service technique communal, en charge de l’éclairage urbain, travaille depuis 2022 à une cartographie des zones dites « à risque nocturne ». Interrogé sur ce sujet, un responsable au sein du service de la division des équipements urbains, précise : « L’éclairage public est une composante essentielle de notre politique de sécurité intégrée. Nous avons entamé un audit de l’ensemble du réseau existant, et un programme de modernisation par LED est en cours. L’objectif est double: améliorer la couverture lumineuse tout en réduisant la consommation énergétique».
Ce plan s’inscrit dans le cadre du projet « Ville durable » de Mohammedia, et repose sur une collaboration entre la commune, la wilaya et des opérateurs privés. Une enveloppe budgétaire de 22 millions de dirhams y aurait été allouée pour la première phase. Mais sur le terrain, les habitants des zones délaissées peinent à voir les effets concrets de ces annonces. Dans certains quartiers, des poteaux d’éclairage flambant neufs restent éteints faute de raccordement ou de maintenance régulière.
Houda BELABD
À Mohammedia, les résultats de cette transition restent partiels, mais les attentes, elles, sont claires. Pour beaucoup, plus de lumière, c’est moins de peur. Reste à savoir si cette lumière sera équitablement répartie entre tous les quartiers, ou si elle continuera à suivre les lignes de fracture sociales de la ville. Car l’insécurité ne se nourrit pas seulement de l’obscurité physique, mais aussi de l’invisibilité politique.