Il parlait doucement, d’une voix presque chuchotée, comme s’il craignait que ses mots ne trahissent les tumultes intérieurs qui l’habitaient.
Brillant d’intelligence, il portait pourtant sur ses épaules le fardeau d’une pauvreté qu’il n’avait pas choisie.
Son père, humble vendeur de menthe, de kasbour et de maâdnous, incarnait cette misère silencieuse dont O……avait honte, mais qu’il n’évoquait jamais.
Avec une ténacité presque héroïque, il avait arraché son baccalauréat, puis une licence en sciences, défiant un destin qui semblait vouloir le plier.
Il s’était construit une famille, uni à une femme qu’il aimait profondément, et qui lui rendait cet amour avec la même intensité.
Mais dans l’ombre de ces succès modestes, O….. restait en guerre avec lui-même.
Grand admirateur de Dostoïevski, il retrouvait dans les personnages du maître russe ses propres contradictions : la lutte entre la lumière et l’obscurité, entre la souffrance et l’espoir.
Un jour, tardivement mais brutalement, l’alcool s’invita dans sa vie.
Non pas comme une distraction, mais comme un acte de révolte, presque suicidaire.
Il cherchait à transcender une douleur psychologique qu’aucune réussite sociale ou intellectuelle ne semblait pouvoir apaiser.
O…. est mort d’un cancer du poumon.
Il etais un fumeur excessif.
Mort, pauvre aux yeux du monde, mais immensément riche dans les cieux de l’esprit.
Je ne t’oublierai jamais, mon ami Ssi Mohammed O….., que les intimes appelaient Taleb.
Tu étais un mystère, un poème inachevé, une âme dostoïevskienne dans un monde trop froid pour te comprendre.