Une série documentaire signée Movistar Plus+ éclaire les dessous géopolitiques de la crise de l’îlot Leila

À l’occasion du 23e anniversaire de la crise de l’îlot Leila (Perejil), la plateforme espagnole Movistar Plus+ lève le voile sur une production documentaire en trois volets, qui reconstitue avec précision les dix jours de tension extrême ayant opposé le Maroc et l’Espagne à l’été 2002.

À partir du 10 juillet 2025, Movistar Plus+ diffusera « Perejil : la guerre qui n’était pas », une série documentaire réalisée par Tian Riba et produite par El Terrat (The Mediapro Studio). En trois épisodes, cette production exhume les mécanismes d’un affrontement géopolitique sous haute tension autour de l’îlot Leila, rocher inhabité situé à seulement quelques encablures des côtes marocaines et espagnoles, devenu en juillet 2002 l’épicentre d’un bras de fer diplomatique aux multiples ramifications.
 
La série revisite cet épisode souvent relégué au rang d’ »incident mineur », mais qui, selon plusieurs analystes, aurait pu déboucher sur une crise militaire majeure entre deux alliés de l’OTAN. Pour ce faire, « Perejil » s’appuie sur un dispositif narratif hybride alliant images d’archives rares, séquences reconstituées dans le style du thriller politique, et plus de 40 témoignages de figures diplomatiques, militaires et gouvernementales clés, espagnoles, marocaines, américaines et françaises.
  
Le 11 juillet 2002, un groupe de gendarmes marocains débarque sur l’îlot de Perejil – que le Maroc nomme Leila – et y hisse le drapeau national. Ce territoire inhabité d’à peine 13.000 m², situé à moins de 200 mètres des côtes marocaines, fait depuis des décennies l’objet d’une souveraineté tacite, mais juridiquement floue. La réaction espagnole est fulgurante : quelques jours plus tard, une opération militaire baptisée Romeo-Sierra est déclenchée. Les forces spéciales espagnoles délogent les éléments marocains, provoquant une crise ouverte entre Rabat et Madrid, suivie de très près par les capitales occidentales.
 
Un thriller diplomatique à haute tension
 
La série met en lumière l’intensité de la mobilisation diplomatique ayant entouré cette escalade. Parmi les intervenants, on retrouve José María Aznar, alors président du gouvernement espagnol, Ana Palacio (ministre des Affaires étrangères), Federico Trillo (ministre de la Défense), ou encore Jorge Dezcallar, ex-directeur du renseignement espagnol. Côté américain, l’ancien sous-secrétaire d’État Richard Armitage retrace les efforts déployés par Washington pour désamorcer la crise.
 
La position de la France, quant à elle, est scrutée avec attention. Paris aurait en effet adopté une attitude plus favorable au Maroc, bloquant ainsi l’élaboration d’une position commune européenne. Un positionnement qui a renforcé l’isolement relatif de Madrid sur le plan diplomatique, tout en illustrant les subtils jeux d’équilibre régionaux.
 
L’OTAN, la Ligue arabe et le spectre d’un conflit
 
L’un des éléments les plus marquants mis en lumière par Perejil est la menace d’un élargissement du conflit. Selon plusieurs témoins, l’Espagne aurait envisagé de faire jouer l’article 5 du traité de l’Atlantique Nord – qui stipule qu’une attaque contre un allié est une attaque contre tous. Un précédent qui aurait marqué une rupture stratégique majeure dans la politique de l’Alliance.
 
La série montre également comment les grandes puissances ont rapidement compris l’importance géostratégique de la zone. Situé à proximité immédiate du détroit de Gibraltar – point de passage stratégique mondial – l’îlot Leila cristallisait les tensions liées à la souveraineté, à la sécurité maritime, mais aussi aux héritages coloniaux non soldés.
 
L’îlot comme prisme des contentieux persistants
 
Au-delà de la seule crise de l’îlot Perejil, la série interroge la portée symbolique de cet événement dans le cadre des relations hispano-marocaines. Elle met en parallèle ce face-à-face militaire avec d’autres dossiers toujours sensibles : la question du Sahara, les villes occupées de Sebta et Mellilia, ou encore le contrôle du détroit et des flux migratoires.
 
L’îlot, par son insignifiance physique, révèle en creux les enjeux immenses liés aux zones d’ambiguïté territoriale, aux identités souveraines conflictuelles, et aux rivalités d’influence au sein de l’espace euro-méditerranéen.
 
Avec une réalisation soignée, Perejil adopte les codes narratifs du thriller politique tout en s’inscrivant dans une démarche de pédagogie historique. Les producteurs n’ont pas cherché à trancher le débat de souveraineté, mais à restituer le climat de crispation et de décisions prises sous pression. En choisissant de donner la parole à toutes les parties, la série prend le parti d’une mémoire plurielle, indispensable à la compréhension d’un contentieux toujours vivant.

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