Les députés s’apprêtent à amender profondément le projet de loi relatif au droit de grève. Le dépôt d’amendements a été différé de 48 heures pour donner assez de temps aux groupes parlementaires de préparer leurs propositions. Au moment où le gouvernement se montre disposé à coopérer, les parties prenantes semblent d’accord sur une certain nombre de points à modifier. Détails.
Le dépôt d’amendement a été différé de 48 heures à la demande des partis de l’opposition qui ont besoin de plus de temps pour préparer leurs copies. En principe, le processus devrait prendre fin le 28 novembre si le calendrier est respecté.
Pour l’instant, le climat semble serein et toutes les parties prenantes ont l’air résolues à parvenir à des compromis. « La réunion avec le ministre de l’Emploi, Younes Sekkouri, a été productive », confirme notre source, qui fait référence à la réunion que le ministre a tenue, lundi, avec les groupes parlementaires pour aborder les perspectives d’amendement du texte qui fut unanimement rejeté par les syndicats en 2016. Le texte est jugé attentatoire aux libertés syndicales et trop restrictif.
Le ministre, qui a passé le mois de septembre à discuter avec les syndicats, se montre conciliant et coopératif avec les députés. « Ceci est de bonne augure pour la suite », se félicite notre interlocuteur.
En fait, tout le monde s’accorde sur la nécessité de changer radicalement la texture du projet de loi tel que soumis en commission. Les conclusions des rapports de l’INDH et du Conseil économique, social et environnemental (CESE), sont généralement approuvées par les parties prenantes, y compris le gouvernement qui s’est engagé à les prendre en considération. Reste maintenant à savoir à quel point elles seront prises en compte dans les amendements.
Le CESE s’est montré très critique du texte initial. Il a émis une série de propositions, dont la révision totale de la définition de la grève et ses conditions d’exercice. Idem de l’article 5 qui interdit les grèves à des fins politiques sans les définir assez clairement.
L’exclusion de plusieurs catégories professionnelles doit aussi être revue. La rigueur de la définition est vivement recommandée en ce qui concerne les services vitaux et les services minimum qui ne sont pas assez élucidés dans la mouture actuelle. D’autres aspects d’une importance cardinale s’imposent, tels que le délais de notification.
Jusqu’à présent, un consensus se dessine sur certains aspects comme l’évidence de dépénaliser le recours à la grève sachant que le texte initial prévoit des peines de réclusion dans certains cas. Aussi les groupes parlementaires sont-ils conscients de la nécessité de rédiger un préambule qui définit clairement ce que c’est qu’une grève et ses modalités pour ne laisser place à aucune marge d’interprétation. Qui doit appeler à une grève et qui peut l’exercer et dans quelles conditions ? Autant de questions qui seront tranchées. Le projet de loi réduit le droit de grèves aux les syndicats les plus représentatifs, une mesure jugée discriminatoire. En revanche, le sort des coordinations informelles, qui ont foisonné ces derniers temps, demeurent un grand point d’interrogation.
Le délai de notification de la grève devait être réduit, le préavis de 30 jours étant rejeté par la majeure partie des syndicalistes. En revanche, la question des licenciements abusifs suscite le débat. L’opposition veut infliger des amendes aux employeurs tandis que le patronat revendique plus de flexibilité.
Rappelons que le Maroc ne dispose pas d’une loi régissant le droit de grève depuis une soixantaine d’années. L’article 29 de la Constitution garantit ce droit mais les conditions de son exercice sont fixées par voie législative. S’il est voté au Parlement et promulgué, ce projet de loi organique sera le premier texte législatif à régir définitivement ce droit constitutionnel.