Jusqu’au 15 janvier, Abderrahim Yamou expose « Essentiel paysage » à la galerie Delacroix de l’Institut français de Tanger. Dans le jeu des formes et des textures, l’artiste capture des fragments d’un univers suspendu entre fragilité et harmonie, des moments où l’éphémère semble effleurer l’intemporel.
Tout se rencontre pour donner naissance à des écosystèmes autonomes, véritables allégories d’un équilibre écologique à préserver, invitant à une réflexion sur l’espace et le passage du temps. Abderrahim Yamou ne se limite pas à figurer la nature : il en révèle l’âme. Son travail s’inscrit dans une vision contemporaine où l’art devient un outil de réconciliation avec le vivant, une manière d’éveiller notre sensibilité au fragile équilibre de notre monde.
Exploration têtue
Cette exposition est une ode à l’émerveillement, une immersion dans un univers où la vie et l’art se fondent en une harmonie profonde. Il y a quelques semaines, l’auteure Yasmine Chami éclaire la démarche créative du peintre lors d’un précédent accrochage en ces termes : « Le travail de Yamou questionne la germination, c’est une démarche obsessionnelle : ce qui est à l’origine de la vie et qui peut ne pas être vivant, ce qui s’anéantit dans la vie et ne renait plus, ce qui se transforme et prend forme, anime le geste pictural qui éclot et se déploie sous nos yeux.
Le monde végétal, sa puissance et sa délicatesse, sont l’objet du regard du peintre, qui lentement procède à l’excavation de la vie vivante, l’extrait de cet humus qui l’enserre et la rend possible, dans une chorégraphie subtile, invisible, où le mort saisit le vif (…) L’artiste avance ici dans une enquête qui progresse en oscillant entre le vertige de la perte et l’évidence ouverte par l’aventure de la représentation sensible de ce qui pourrait disparaître pour lui : sa propre présence comme architecte d’une vision qui organise l’espace d’apparition des mondes vivants visibles et invisibles. C’est ce tâtonnement qui rend le travail de Yamou infiniment précieux, à savoir l’incertitude sereine qui ouvre la toile où surgissent les formes et les forces de transformation de la vie, liant dans une profonde généalogie les “vitalités organiques et non organiques“ dans le long et patient processus de vie-mort-vie ; c’est ainsi qu’il enroule et déroule tour à tour la cyclicité de temporalités intuitives qui ne nous apparaissent pas mais que son travail nous fait pressentir. De l’enquête à la quête il n’y a qu’un pas… Il y a dans cette exploration têtue de ce qui vit et fait vivre, dans le surgissement de continuités rendues visibles entre le minéral et le végétal la mise à disposition d’un horizon vivant toujours, par-delà les menaces d’anéantissement que certaines œuvres exposent. »