Fitch Ratings : Créances en souffrance, talon d’Achille du secteur bancaire marocain

La forte rentabilité des banques marocaines devrait se poursuivre en 2025 et 2026.Toutefois, les créances en souffrance continuent leur tendance haussière, selon Fitch Ratings.

« Une croissance économique solide soutient les améliorations de l’environnement opérationnel et devrait continuer à dépasser la médiane du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord en raison des grands projets d’investissement du Maroc », souligne l’agence de notation internationale dans une nouvelle note publiée ce mercredi 15 janvier 2025.

Une croissance annuelle moyenne du PIB serait de 3,8 % sur la période 2025-2026, prévoit Fitch Ratings, soulignant que « les réformes structurelles pourraient également être positives pour le crédit des banques, en particulier la création d’un marché secondaire pour les prêts non performants (créances en souffrance), qui devrait être adopté par la loi cette année ».

Fitch ajoute que la croissance des prêts sectoriels a été de 4,5 % en moyenne sur la période 2019-2024, et serait de 6 % en 2025.

« Selon certaines estimations, les grands projets d’infrastructure et industriels pourraient nécessiter plus de 100 milliards USD de financement sur la période 2025-2030 (69 % du PIB de 2023), dont 34 milliards USD rien qu’en 2025. Cela soutiendra la croissance du crédit, qui devrait atteindre en moyenne 6 à 7 % par an au cours des prochaines années », écrit la note. 
 

Contraintes structurelles
Autre élément soulevé par Fitch : les conditions d’exploitation au Maroc sont plus favorables que dans la plupart des pays africains, ce qui se reflète dans la note « BB » attribuée par Fitch à l’environnement opérationnel des banques axées sur le marché intérieur. Il s’agit, poursuit la même source, du deuxième score le plus élevé en termes d’environnement opérationnel parmi les secteurs bancaires africains. « Il se situe un cran en dessous de celui des banques mauriciennes et un cran au-dessus de celui des banques sud-africaines, que nous considérons comme les plus proches homologues des banques marocaines », souligne l’agence.

Toutefois, poursuit-elle, des contraintes structurelles limitent le potentiel de hausse du score d’environnement opérationnel. Il s’agit notamment du faible PIB/habitant du Maroc (2024 : 4 021 USD), de la forte dépendance à l’agriculture (12 % du PIB et 30 % de l’emploi), et du chômage élevé (12,5 %).

« Un score d’environnement opérationnel plus élevé est peu probable sans une revalorisation de la note souveraine « BB+ »/Stable du Maroc ou une augmentation significative du PIB/habitant du pays », estime Fitch.
 

Solide croissance du tourisme  et du BTP
Elle prévoit, néanmoins, que la demande de crédit sera soutenue par une solide croissance non agricole en 2025 et 2026, tirée par les secteurs du tourisme et de la construction, qui devraient enregistrer de bonnes performances en raison des grands événements sportifs que le Maroc doit accueillir. Fitch prévoit aussi que les prêts d’investissement, qui ont augmenté de 14 % à fin octobre 2024, seront le principal moteur de la croissance du crédit à moyen terme, reflétant les vastes plans d’investissement du pays. Les plus grandes banques sont particulièrement bien placées pour profiter de cette dynamique, affirme l’agence.
 
Créances en souffrance
Elle fait savoir, par ailleurs, que ses prévisions de croissance du crédit bancaire pour 2025 de 6 à 7 % ne tiennent pas compte de l’introduction potentielle d’un marché secondaire pour les prêts non performants, qui permettrait aux banques de se débarrasser d’importants stocks de prêts non performants et de libérer des liquidités et des capitaux pour la croissance. Un marché secondaire pour les prêts non performants pourrait donner un coup de pouce significatif aux performances de crédit des banques et aux indicateurs de capital de base, comme ce fut le cas dans certains secteurs bancaires d’Europe du Sud, souligne Fitch.

Selon elle, les prêts non performants des banques marocaines ont plus que doublé au cours de la dernière décennie, atteignant 98 milliards de dirhams à la fin du 3ème trimestre 2024, soit 8,6 % des prêts du secteur et l’équivalent d’environ 7 % du PIB. 

Les prêts dépréciés restent dans les bilans des banques pendant des périodes prolongées en raison de règles fiscales strictes qui obligent les banques à conserver les prêts non performants au moins cinq ans après avoir épuisé tous les efforts de recouvrement. Fitch estime qu’une réduction de 20 % des créances douteuses dans les six plus grandes banques permettrait d’augmenter leur ratio de fonds propres de base de catégorie 1 (CET1) de 185 pb en moyenne, avec des améliorations allant de 120 pb à 320 pb, que les banques pourraient utiliser pour financer leur croissance.

Enfin, Fitch fait remarquer que la capitalisation est une faiblesse relative de certaines banques marocaines. « Une amélioration durable de ce point, accompagnée d’une réduction de l’encombrement en capital par les créances douteuses non couvertes et d’une meilleure génération de capital interne, pourrait, selon l’agence, conduire à des révisions à la hausse des scores de capital.
 

A. CHANNAJE

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