À l’approche du 250ème anniversaire de l’indépendance des États-Unis, qui sera célébré en 2026, la plateforme Share America, relevant du Département d’Etat américain, a chanté les louanges d’une «solide amitié» avec le Maroc, qui remonte aux premières années de l’Amérique.
Il s’agit d’une «amitié unique, qui dure depuis plusieurs siècles, défiant la géographie et les frontières», s’est félicité Youssef Amrani, l’ambassadeur du Maroc aux États-Unis, cité par Share America. Et si d’aucuns estiment que le Royaume ne figure pas parmi les priorités de Washington, les premières prises de position du Secrétaire d’État américain, Marco Rubio, dès son entrée en fonction, témoignent du contraire. Il a réaffirmé le soutien des États-Unis à la souveraineté du Maroc sur le Sahara, considérant l’initiative d’autonomie proposée par Rabat comme la seule base crédible et réaliste de solution, mettant fin à l’ambiguïté de l’Administration Biden. Sur le plan économique, les États-Unis comptent parmi les principaux investisseurs étrangers au Maroc, notamment dans les secteurs du phosphate et de l’industrie de défense. La coopération sécuritaire, elle aussi, s’intensifie à travers l’acquisition d’équipements militaires et l’organisation d’exercices conjoints, tels que «African Lion». Sur le plan politique, Washington soutient activement la cause nationale marocaine, en particulier à travers son rôle de penholder de la Résolution onusienne sur le Sahara. Un positionnement qui affirme que l’adhésion américaine à la position marocaine – réaffirmée au plus haut niveau de l’État – n’est ni conjoncturelle ni circonstancielle, selon Saïd Temsamani, analyste politique, qui note qu’elle s’inscrit dans une vision géostratégique où le Maroc est perçu comme un pilier de stabilité dans une région volatile, un acteur crédible qui offre des solutions réalistes et pragmatiques à des conflits gelés. Le soutien à l’initiative d’autonomie marocaine traduit une reconnaissance de la pertinence d’une approche marocaine qui conjugue paix, développement et respect des équilibres régionaux. Raison pour laquelle l’ancien ambassadeur américain au Maroc, David Fischer, a déclaré que «quand vous pensez aux relations entre le Maroc et les Etats-Unis d’Amérique, vous ne pouvez que constater qu’il ne peut y avoir de meilleures relations en Afrique et au Moyen-Orient». Dans une déclaration à MAP-Washington à l’occasion du 26ème anniversaire de l’intronisation de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Fischer a ajouté qu’il s’agit d’une relation «solide et durable, vouée à se renforcer encore plus dans l’avenir», ce qui augure d’une nouvelle ère dans les relations entre les deux pays.
Nouvelle vision américaine
Aujourd’hui, avec Trump de nouveau à la Maison Blanche, Washington veut préserver l’hégémonie américaine face aux nouvelles puissances émergentes, mais veut s’appuyer sur les alliés qu’ils jugent dignes de confiance. Le Maroc en fait partie. Dans cette perspective, Emmanuel Dupuy estime qu’il y aura forcément une accélération du partenariat maroco-américain sous Trump, qui pourrait faire appel à nouveau à l’ancien ambassadeur David Fisher, celui qui avait signé la carte intégrale du Royaume. Ce ne serait qu’un premier pas vers le parachèvement de l’ensemble des engagements de la Déclaration tripartite du 22 décembre 2020, en vertu de laquelle les Américains avaient promis un Consulat à Dakhla qui n’a pas encore vu le jour. Peu de temps avant son départ du département d’Etat en 2020, Mike Pompeo avait annoncé une antenne virtuelle. A présent, il serait difficile de sonder les intentions de Washington, mais les Américains sont si attachés aux accords d’Abraham, qu’ils veulent consolider et élargir, qu’ils ne peuvent pas se permettre de se soustraire de leurs engagements. «Les Etats-Unis profitent des accords d’Abraham pour réinventer leurs relations avec les pays signataires à titre bilatéral», rappelle Emmanuel Dupuy, qui n’exclut pas un renforcement de la coopération militaire dans un contexte d’accroissement des rivalités sino-américaines en Afrique.
Si le Royaume trouve grâce donc aux yeux de Washington, encore plus aujourd’hui sous le règne des Républicains, c’est parce qu’il y a le poids de l’Histoire et des intérêts partagés. (Voir article ci-contre).
Souhail AMRABI
3 questions à Emmanuel Dupuy, Président de l’Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE) : « Les accords d’Abraham donnent un nouvel agenda transatlantique commun »
Avec Trump à la Maison Blanche, comment peut-on commenter les relations maroco-américaines ?
Il y aura forcément une accélération du partenariat maroco-américain. Plusieurs éléments le prouvent, dont la déclaration du nouveau Secrétaire d’Etat, Marco Rubio, qui a vanté l’exemplarité du Maroc en Afrique. Cela fait du Royaume, du point de vue américain, l’endroit le plus sûr pour investir et se lancer en Afrique. N’oublions pas qu’il est fort probable que l’ancien ambassadeur David Fisher, qui avait signé la fameuse carte intégrale du Maroc avec le Sahara, revienne à son poste. Ce sera la continuité de la reconnaissance de la marocanité du Sahara et une confirmation de la position américaine qui n’a pas changé depuis 2020.
Il faut donc s’attendre à un nouvel élan de coopération…
En effet, politiquement, Trump donnera un nouvel élan aux accords d’Abraham qui devraient être élargis avec d’autres pays, dont l’Arabie Saoudite. Il ne faut jamais oublier que les accords d’Abraham concernent autant Israël que les Etats-Unis qui, en les parrainant, réinventent leurs relations avec les pays signataires. Les accords d’Abraham donnent un nouvel agenda transatlantique commun sur fond d’intérêts croisés entre le Maroc et les Etats-Unis.
Au-delà des accords d’Abraham, dont on parle souvent, peut-on s’attendre à d’autres avancées ?
Maintenant que les Républicains sont au pouvoir, s’il y a une avancée concernant la représentativité de l’Afrique au Conseil de Sécurité, le Maroc a de fortes chances de se voir confier l’un des deux sièges à pourvoir aux côtés de l’Afrique du Sud. L’Egypte est trop dépendante économiquement de la Chine et des Emirats Arabes Unis. Elle est plus tournée vers le Moyen-Orient et manque de profondeur africaine. Par conséquent, il semble que le Maroc, dont l’ancrage africain est incontestable, devient, de facto, pour les Etats-Unis un choix naturel et bénéfique dans sa stratégie d’occidentalisation du continent africain. En plus, les Américains sont convaincus que les Européens, notamment les Français, ne sont plus les acteurs principaux en Afrique et vont certainement vouloir y installer une base militaire, le Sud du Maroc paraît un zone adéquate.
(Archives)
Share America : Une amitié séculaire entre le Maroc et les États-Unis
L’amitié entre le Maroc et les États-Unis remonte à 1777, lorsque le Sultan Mohammed III autorise les navires américains à accéder aux ports marocains, devenant ainsi le premier pays souverain à reconnaître l’indépendance américaine. Cette décision marque le début d’une relation unique, officialisée par le Traité de paix et d’amitié signé en 1786, toujours en vigueur aujourd’hui. Malgré des débuts commerciaux hésitants, les liens n’ont cessé de se renforcer. En 1821, le Maroc offre aux États-Unis un bâtiment à Tanger pour y établir leur légation, aujourd’hui transformée en musée – seul site historique national américain hors du territoire des États-Unis.
Durant la Seconde Guerre mondiale, le Maroc accueille les troupes américaines qui combattent l’invasion nazie. Aujourd’hui encore, les deux pays coopèrent militairement et luttent ensemble contre le terrorisme. Les relations économiques sont aussi solides : plus de 7 milliards de dollars d’échanges bilatéraux en 2024, faisant des États-Unis l’un des cinq principaux investisseurs au Maroc. Partenaire des Accords d’Abraham en 2020, le Maroc joue un rôle régional salué par Washington. À l’approche du 250ème anniversaire américain en 2026, le Royaume reste son plus vieil allié.
Leadership marocain : Confessions de David Fischer
L’ancien ambassadeur américain au Maroc, David Fischer, a salué les efforts remarquables du Maroc, sous la conduite de Sa Majesté le Roi, pour la promotion et la diffusion d’un Islam du juste-milieu, prônant la coexistence et la compréhension mutuelle dans un monde fracturé, en proie aux conflits et aux désaccords.
S’arrêtant sur les avancées en termes de développement socio-économique accomplies dans les provinces du Sud du Royaume, le diplomate s’est dit impressionné, à l’occasion du 26ème anniversaire de l’intronisation de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, par les investissements substantiels réalisés dans cette région et les opportunités qu’ils créent.
Il s’est également félicité des progrès que toutes les régions du Maroc ont connus depuis le début du Règne de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, dans les différents domaines, notamment dans les secteurs de l’économie, de la santé et de l’éducation.
Fischer a souligné que grâce au leadership du Souverain, le Maroc a connu un processus de modernisation et de réformes à même d’ériger le Royaume en «leader régional» et en «acteur majeur en Afrique».