L’intelligence artificielle est aujourd’hui un enjeu central pour les entreprises et les décideurs. Pourtant, elle est souvent abordée de manière réductionniste, soit comme une avancée purement technologique, soit comme un phénomène autonome déconnecté des dynamiques économiques et sociales. Or, dès ma thèse de doctorat en économie soutenue à La Sorbonne en 1998 sur la complexité des systèmes d’information et dans mon HDR soutenue à Toulouse en 2005 sur le paradigme numérique, j’ai souligné que la complexité ne peut être ignorée si l’on veut comprendre et maîtriser ces transformations. Inspirons-nous également d’Edgar Morin et de sa pensée complexe pour appréhender l’IA dans toute sa profondeur.
Une Expérience Académique et Professionnelle au Service de la Complexité du Numérique
En parallèle, mon parcours académique en tant que professeur et chercheur m’a donné la possibilité de contribuer à la formation de générations d’étudiants et de chercheurs en informatique et en sciences économiques. J’ai toujours veillé à transmettre une approche systémique, intégrant les dimensions économiques, organisationnelles et technologiques du numérique.
De plus, mon expérience d’entrepreneur dans le numérique depuis le début des années 90, avec des projets en multimédia offline et online dès 1995 avec l’avènement de l’Internet commercial, m’a permis d’être un témoin privilégié de l’évolution rapide du numérique et de la montée en puissance de l’IA dans les modèles économiques.
L’IA et mon pays, le Maroc : Une Vision Stratégique pour un Développement Durable
J’espère que les réflexions et recommandations que je propose seront intégrées dans la stratégie Maroc Digital 2030. Il est impératif que cette stratégie ne se contente pas d’une vision technologique limitée, mais qu’elle adopte une approche systémique de l’IA et du numérique en général. Cette approche doit inclure :
– L’éducation et la formation : Assurer que les Marocains développent des compétences adaptées à l’ère numérique, en intégrant l’IA dans les cursus dès le secondaire et en favorisant la recherche appliquée dans les universités.
– L’accompagnement des entreprises : Encourager les PME et les artisans à intégrer des solutions numériques pour améliorer leur compétitivité et accéder aux marchés internationaux.
– Une gouvernance éthique et inclusive de l’IA : Éviter que l’IA ne creuse les inégalités en mettant en place des régulations adaptées et des mécanismes d’inclusion numérique pour ceux qui risquent d’être laissés pour compte.
– Le développement d’un écosystème technologique local : Favoriser la création de startups marocaines spécialisées en IA et en transformation digitale, en leur donnant accès aux financements et infrastructures nécessaires.
Le Maroc a les atouts pour devenir un hub technologique et d’innovation en Afrique, à condition que sa transformation numérique repose sur une vision holistique et une gouvernance éclairée, capable d’embrasser la complexité du numérique et de l’IA.
Conclusion : Maîtriser l’IA par la Compréhension de sa Complexité
S’inspirer de la pensée complexe d’Edgar Morin et de mes travaux sur la complexité des systèmes d’information et du paradigme numérique permet d’éviter les erreurs d’une vision trop réductrice de l’IA. Plutôt que de la considérer comme un simple outil technologique ou une menace incontrôlable, il est essentiel de la penser comme un phénomène systémique et interactif, dont la compréhension nécessite une approche transversale et évolutive.
Mon parcours professionnel et académique m’a démontré que les défis liés à l’IA ne sont pas seulement techniques : ils sont aussi organisationnels, économiques et humains. La capacité à naviguer dans cette complexité est ce qui distingue ceux qui exploitent l’IA efficacement de ceux qui la subissent.
Seule une intelligence collective, nourrie par une pensée ouverte et non fragmentée, permettra de tirer parti de l’IA de manière pertinente et éthique, en alignant son développement avec les besoins réels des organisations et de la société.
Je souhaite que mon pays, le Maroc, intègre ces principes dans sa stratégie numérique pour 2030 et devienne un leader en matière d’innovation et d’intelligence artificielle. L’avenir numérique du Maroc ne peut se construire qu’en adoptant une approche réfléchie, inclusive et adaptée aux réalités socio-économiques du pays.