Sécurité hydrique : L’effet salvateur de la stratégie Royale des barrages [INTÉGRAL]

Construction accélérée de barrages, développement massif des stations de dessalement, valorisation croissante des eaux usées traitées… Dans un contexte hydro-climatique particulièrement fragile, le Maroc redouble d’efforts pour sécuriser son approvisionnement en eau potable et garantir les besoins en irrigation. Longtemps reconnu pour sa politique ambitieuse de grands barrages, le Royaume opère aujourd’hui un tournant stratégique en inscrivant sa gestion de l’eau dans une logique intégrée de «nexus eau–énergies renouvelables–sécurité alimentaire». Round up d’un chantier structurant et sensible, où l’anticipation s’impose plus que jamais comme la clé de voûte de la résilience nationale.

Suite à la succession des années déficitaires en précipitations, le Maroc traverse aujourd’hui une des pires sécheresses de son Histoire récente. Dans les campagnes comme dans les villes, l’eau, jadis abondante dans certaines régions, devient une denrée rare à gérer au plus près, surtout qu’entre 2018 à 2024, les saisons arides ont engendré des déficits atteignant jusqu’à 85% par rapport à la moyenne annuelle. Et si les ressources hydriques du Royaume sont estimées à 22 milliards de m3, leur répartition demeure très déséquilibrée – avec 7% du territoire concentrant plus de 53% de précipitations -, accentuant la pression sur des régions entières, déjà vulnérables.
 
Face à ce choc qui met à mal la satisfaction des besoins vitaux en termes de mobilisation de quantités d’eau suffisantes pour satisfaire les divers usages, le Maroc ne part pas de zéro et peut se targuer d’avoir une infrastructure hydraulique importante et déjà établie grâce à la vision éclairée de Feu Sa Majesté Hassan II qui avait très tôt lancé le vaste chantier d’édification de barrages. La sécurité hydrique du Royaume a depuis continué, sous la conduite de SM le Roi Mohammed VI, à constituer un chantier stratégique et prioritaire au vu des diverses avancées réalisées durant les deux dernières décennies. Cette politique constitue un levier fondamental dans le renforcement de la résilience hydrique du Maroc, a affirmé le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, lors d’une conférence organisée, jeudi dernier, par nos confrères Médias24. Résultat des comptes : le pays compte 154 grands barrages, représentant une capacité de stockage de 20,7 milliards de m³, ainsi que 150 petits et moyens ouvrages. Un arsenal qui témoigne de l’engagement de l’Etat de garantir à chaque citoyen un accès sûr et équitable à l’eau.
 

 

Lutte sur plusieurs fronts
 
Sauf que ces barrages, dont les effets bénéfiques sont indéniables depuis plus de quarante ans, ne constituent plus l’unique levier de l’offensive nationale contre le stress hydrique. «Un véritable changement de paradigme s’est opéré dans la politique de l’eau», a souligné Nizar Baraka, expliquant qu’il ne s’agit plus seulement de mobiliser les ressources conventionnelles, mais d’adopter une approche fondée sur un mix hydrique. Cette nouvelle vision articule ressources conventionnelles et non conventionnelles, sobriété dans l’usage de l’eau et préservation des nappes souterraines. Un virage devenu indispensable, quand on sait que la dotation en eau par habitant est passée de 2.560 m³ par an en 1960 à seulement 600 m³ aujourd’hui – bien en deçà du seuil de stress hydrique établi par l’ONU à 1.000 m³ par habitant et par an.
 
Dans le cadre de sa nouvelle politique de l’eau, le Royaume fait du dessalement de l’eau de mer un pilier stratégique, avec l’ambition d’assurer une production de 1,7 MMm³ à l’horizon 2030. «Dix-sept stations de dessalement ont déjà été mises en place, pour une capacité actuelle de 320 millions de mètres cubes (Mm³), contre seulement 40 Mm³ en 2021», a indiqué le ministre, également Secrétaire Général du Parti de l’Istiqlal, ajoutant que cette capacité devrait atteindre 532 Mm³ avec les projets actuellement en cours, tels que la station de Dakhla, la nouvelle installation de Safi ou encore l’extension d’unités existantes. Une capacité de 900 Mm³/an sera par ailleurs ajoutée grâce au partenariat titanesque avec les Émirats Arabes Unis. «Si nous disposons aujourd’hui d’un programme massif de stations de dessalement, c’est surtout grâce à la volonté Royale d’assurer la sécurité hydrique du Royaume et à cet accord important qui porte sur un investissement de 14 milliards de dollars», s’est félicité Nizar Baraka. Parallèlement, le Royaume déploie un vaste programme d’unités monoblocs de dessalement et de déminéralisation, pour un total de 244 stations, dont 32 sont déjà opérationnelles.
 
L’exposé du ministre souligne en outre quelque 300 projets de collecte des eaux pluviales qui sont en cours dans 21 provinces, combinés à des programmes de désenvasement pour préserver la capacité des barrages. La tutelle cherche également à atteindre 100 Mm³/an de réutilisation d’eaux épurées d’ici 2027. Le programme Oasis (2024-2028) prévoit 22 projets de recharge artificielle dans le Sud-Est du pays.
 

 

L’eau, mais aussi l’énergie « renouvelable » !
 
«Nous allons aussi produire les énergies renouvelables nécessaires à la réalisation de ces projets», épingle le ministre, précisant que sur les 1,7 milliard de mètres cubes prévus via le dessalement, 500 millions seront réservés à l’irrigation et à l’agriculture. Le plus saillant dans ledit projet c’est que l’énergie renouvelable, principalement produite dans le Sud du pays, sera acheminée vers le Nord grâce à une ligne électrique de 1.400 kilomètres, d’une capacité de 3.000 mégawatts.
 
C’est dire à quel point le Maroc inscrit désormais sa politique de l’eau dans une logique de «nexus eau–énergies renouvelables–sécurité alimentaire». L’enjeu est de garantir durablement l’approvisionnement en eau du pays, tout en anticipant les pressions démographiques, les exigences économiques et les impacts du changement climatique. Pour ce faire, dix Plans Directeurs d’Aménagement Intégré des Ressources en Eau (PDAIRE) ont été validés, offrant une vision territorialisée, fine et actualisée, des ressources disponibles, des besoins identifiés et des priorités d’intervention.
 
Parallèlement, la révision du Plan National de l’Eau s’appuie sur une série d’études approfondies.Du diagnostic des ressources mobilisables à l’élaboration de feuilles de route pour équilibrer offre et demande, en passant par l’identification des besoins sectoriels, ou encore l’analyse des bilans prévisionnels, la tutelle se penche sur un modèle d’optimisation pour faire face à un contexte hydro-climatique particulièrement fragile.
 
Cette dynamique de planification s’accompagne également de réformes institutionnelles et juridiques, afin de doter le secteur de l’eau d’un cadre plus intégré, efficace et résilient, à même d’assurer la souveraineté hydrique du Maroc pour les générations futures.
 
 

​Interconnexion des bassins : Enjeux de l’entraide inter-régionale
Pierre angulaire du chantier stratégique de renforcement de la sécurité hydrique du Royaume, les projets d’interconnexion des bassins, pour remédier à la problématique du déficit en eau potable et d’irrigation dans certaines régions, ont également permis au Royaume de gérer les fortes périodes de stress hydrique. Les projets de transfert de l’eau se poursuivent après le succès remarquable de la tranche prioritaire qui a permis de raccorder le barrage de garde au niveau du bassin hydraulique du Sebou au barrage Sidi Mohammed Ben Abdellah (SMBA) situé dans le bassin hydraulique du Bouregreg. La première étape permet déjà d’assurer une partie substantielle de l’approvisionnement en eau potable de Rabat et sa région. Le transfert de l’eau sur une distance de 67 kilomètres permet désormais d’acheminer un débit de 15 m3/s pour un volume transférable situé entre 300 et 400 Mm3/an. L’objectif est d’augmenter le débit de transfert pour passer de 15 m³/s (mètres cubes par seconde) à 45 m³/s.
 
Les projets de transfert d’eau, notamment entre bassins excédentaires et bassins déficitaires, viendront compléter les infrastructures dédiées à la mobilisation des ressources non conventionnelles. Pour Nizar Baraka, l’ensemble de ces solutions s’inscrit dans une nouvelle logique de solidarité territoriale. Alors que, historiquement, les zones rurales alimentaient les villes côtières en eau, on assiste aujourd’hui à un renversement de cette dynamique. Grâce au dessalement, ce sont désormais les villes côtières qui pourront transférer une partie de leurs ressources vers les zones rurales. Une évolution majeure qui permettra non seulement d’accompagner le développement du monde rural, mais aussi de consolider la souveraineté alimentaire du pays.

​Politique des barrages : Epine dorsale d’une vision Royale
Conscient des enjeux stratégiques que représente la question de l’eau pour le développement durable, le Souverain l’a placée au cœur des priorités nationales dès Son intronisation. Poursuivant la politique visionnaire des barrages lancée par Feu Sa Majesté Hassan II, Sa Majesté le Roi Mohammed VI a donné une nouvelle impulsion à cette stratégie, permettant au Maroc de mieux résister aux aléas climatiques, là où plusieurs pays de la région en subissent de plein fouet les conséquences.
 
Prévoir, anticiper, faire preuve de solidarité et garantir la justice territoriale : tels sont les principes directeurs fixés par le Souverain pour assurer une répartition équitable des ressources hydriques à travers l’ensemble du territoire national. Sous le règne de SM Mohammed VI, 62 barrages ont été construits. À ces infrastructures s’ajoutent 14 nouveaux grands barrages actuellement en cours de réalisation dans six régions du pays, représentant une capacité totale d’environ 4,8 milliards de mètres cubes. Sept autres barrages sont programmés au-delà de 2027. Par ailleurs, plusieurs projets de barrages de taille moyenne et de retenues collinaires sont également en chantier ou en préparation.
 
Aujourd’hui, 56% des 62 barrages réalisés participent à l’approvisionnement du Royaume en eau potable, dont le plus marquant serait sans doute le barrage de Tidass situé à Khémisset au Sud-Ouest de la capitale. Forte d’une capacité de stockage de 507 millions de m3, cette infrastructure, dont l’enveloppe est estimée à 867 MDH, contribue à l’irrigation de plus de 4.600 ha dans la région, tout en approvisionnant l’eau potable à quelque 141.000 habitants. Ceci dit, pour l’ensemble des barrages du Royaume, l’irrigation reste toutefois la principale destination de ces ressources, mobilisant plus de 72% des volumes, contre seulement 11,3% pour la production d’énergie.
 
Certaines régions se démarquent tant par le nombre de barrages que par leur capacité de stockage. Ainsi, les régions de Béni Mellal–Khénifra, Marrakech–Safi, l’Oriental, Rabat–Salé–Kénitra et Tanger–Tétouan–Al Hoceima comptent chacune entre 7 et 8 barrages. En termes de capacité de stockage, Rabat–Salé–Kénitra se place en tête avec plus de 1,6 milliard de mètres cubes, suivie de Drâa–Tafilalet (plus de 1,18 milliard) et de Fès–Meknès (plus de 1 milliard).

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